Abracadavra by Peter Lovesey

Abracadavra by Peter Lovesey

Auteur:Peter Lovesey [Lovesey, Peter]
La langue: fra
Format: epub
Publié: 2016-09-08T00:00:00+00:00


10

Thackeray n’éprouva aucune difficulté à se faire admettre parmi les machinistes.

— Tu as l’air costaud, lui dit le contremaître, mets-toi donc dans le groupe là-bas.

Il identifia ce groupe sans la moindre hésitation : trois silhouettes massives, légèrement à l’écart, faisaient penser à des ours de zoo, avides de friandises. Il se joignit à eux.

— Un boulot en or, lui confia l’un des hommes lorsque les équipes se rendirent à leur poste de travail. Quelques décors à déplacer, un peu de levage, c’est tout. Un seul os : le numéro avec changement de décor. On a toujours des ennuis, mais on n’y peut rien ! Comment peut-on demander à quatre hommes de faire aller et venir une demi-douzaine de panneaux, tout en continuant à balancer dans les airs cette sacrée nacelle ?

— Une nacelle ?

Son informateur leva les yeux au ciel, ou plutôt en direction des cintres : une énorme corbeille était suspendue à deux poulies.

— Le travail se fait à la force du poignet, sans contrepoids, donc tout est contrôlé par nous. Il y a bien quelques gars dans les cintres avec des cordes, mais on se paye tous les efforts musculaires ! Harry !

Une voix lui répondit du haut de la passerelle de service.

— Desserre tes cordes, Harry, c’est le moment de descendre la nacelle.

Il actionna un treuil dans les coulisses, et celle-ci vint se poser en douceur sur les planches.

— Je commence à comprendre, grommela Thackeray, la nacelle d’un ballon !

— Tout juste, mon vieux. D’ici ça casse rien, bien sûr, mais quand les lampes sont allumées, le rideau devient tout bleu et de la salle on croirait voir des aéronautes au-dessus des jardins de Crystal Palace. Ça y est ! Et maintenant il n’y a plus qu’à attendre l’arrivée de madame.

— Une dame va monter ?

— D’un instant à l’autre, mon vieux. Ensuite il faudra la hisser à nouveau et elle restera dans les cintres jusqu’à ce que nous la redescendions pour les changements de décor. Quand tu verras celle qu’on se paye ce soir, tu comprendras pourquoi on a refusé de mettre des sacs de sable sur la nacelle. Plunkett prétend que le réalisme l’exige, mais on a répondu : « Les sacs de sable ou la dame, c’est l’un ou l’autre ; les cordes ne supporteront pas tout à la fois et nous non plus ! » Si on appelle pas ça du réalisme…

— Sans aucun doute, approuva Thackeray. À quoi allez-vous m’employer ce soir ?

— Tu m’aideras d’abord à hisser l’engin, et puis ensuite on te mettra aux accessoires. Il y aura du matériel lourd à pousser tout à l’heure.

— Très bien, répondit Thackeray.

Mais l’arrivée de la dame coupa court aux explications, et il comprit aussitôt pourquoi les sacs de sable étaient exclus : son poids seul aurait suffi à renverser immédiatement tout le mécanisme de levage. Dans son accoutrement – veste et jupe en taffetas marron, grand chapeau fleuri noué sous le menton par un foulard rose –, elle offrait un véritable défi



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