Abbesses (Chambon Roman policier) (French Edition) by Clerc-Murgier Hélène

Abbesses (Chambon Roman policier) (French Edition) by Clerc-Murgier Hélène

Auteur:Clerc-Murgier, Hélène [Clerc-Murgier, Hélène]
La langue: fra
Format: epub
ISBN: 9782330021894
Éditeur: Éditions Actes Sud
Publié: 2013-06-04T22:00:00+00:00


Le jacquemart du campanile de la Samaritaine sonna la demie de trois heures : une splendide figurine de métal représentant un homme d’arme frappa alors deux coups de son fin marteau sur la cloche de l’horloge astronomique. Jacques Chevassut regarda le bâtiment comme s’il le voyait pour la première fois. Il savait que cette pompe, qui avait été construite entre la première et la deuxième arcade du pont, avait été fouillée de fond en comble par les commissaires enquêteurs après la disparition de celui qui avait été nommé concierge et gouverneur de la machine, Hugo van der Meir. On n’avait rien trouvé, le bâtiment était entièrement vide. Et on n’avait même pas retrouvé son locataire, disparu sur une route qui le menait en Allemagne.

Il s’avisa qu’il était temps de rentrer chez lui, place Dauphine. Il arriva au moment où l’on se pressait pour voir le fameux Tabarin dont les tréteaux avaient été dressés face à la statue d’Henri IV. Tabarin et son compère Mondor vendaient là un baume bon aux douleurs de teste, aux migraines, vertige, ténébrosité du cerveau. Ils utilisaient surtout leur verve d’hommes de foire mêlée à leur talent d’improvisateur pour créer de véritables petites farces où le comique le disputait à une insolence qui avait séduit Marie de Médicis quelques années auparavant lors de son exil forcé à Blois. Et c’est sur les conseils de la souveraine qu’ils avaient rejoint Paris, où leur succès ne se démentait pas depuis. Tabarin s’apprêtait à faire éditer ses œuvres sous le titre d’Inventaire universel des œuvres de Tabarin, contenant ses fantaisies, dialogues, paradoxes, gaillardises, rencontres…

Chevassut atteignit la place au moment où Tabarin, outrageusement maquillé, portant un large manteau et une chemise blanche très ample, donnait à son chapeau les formes les plus diverses pour amuser le public :

– Ceux qui sont les plus prodigues, mon maître, ce sont les gueux parce que pour un double, ils vous donneront plus de bénédictions qu’un médecin de santé pour vingt écus !

Légèrement en retrait, Mondor, impassible, ignora le propos. Son habit court et ajusté, ses cheveux qui se prolongeaient d’une barbe blanche sur le menton, lui donnaient un air de respectabilité contrastant avec l’attitude outrancière de Tabarin. Il se tourna d’ailleurs gravement vers la chanteuse et les trois musiciens qui se tenaient au fond de la scène et leur fit signe d’intervenir, interrompant ainsi Tabarin qui gesticulait et faisait les grimaces les plus excentriques. Commença un air de cour de Pierre Guédron, accompagné d’une viole de gambe et d’un théorbe charmant dont la réalisation poétique soutenait admirablement la beauté du texte : Doncques par force tu pourchasses ce qu’on avoit par amour, Donc ton amour trop plein d’audace, Me veut faire un mauvais tour. Mais Tabarin se mit à danser un bransle de la manière la plus extravagante qui fût en se déplaçant sur scène avec de grands gestes des bras, provoquant l’hilarité du public.

Complètement absorbé par ce qui se passait sur scène, Chevassut sursauta lorsqu’il sentit qu’on le tirait par la manche.

Il se retourna vivement.



Télécharger



Déni de responsabilité:
Ce site ne stocke aucun fichier sur son serveur. Nous ne faisons qu'indexer et lier au contenu fourni par d'autres sites. Veuillez contacter les fournisseurs de contenu pour supprimer le contenu des droits d'auteur, le cas échéant, et nous envoyer un courrier électronique. Nous supprimerons immédiatement les liens ou contenus pertinents.