Voyages et aventures du docteur festus by Rodolphe Töpffer

Voyages et aventures du docteur festus by Rodolphe Töpffer

Auteur:Rodolphe Töpffer [Töpffer, Rodolphe]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Roman
Publié: 2012-04-03T22:00:00+00:00


XII

Le royaume de Vireloup jouit d’un gouvernement paternel. Le roi y est le père de ses sujets, qu’il traite en enfants ; veillant avec sollicitude sur leurs lectures, sur leurs conversations, sur leur manger, sur leurs vêtements, et voulant qu’ils tiennent tout de lui. C’est pour cela qu’il prohibe les livres, les idées, les marchandises, les denrées du dehors, et qu’il fait surveiller ceux qui causent ; les mettant en punition dans ses cachots royaux, s’ils causent mal, ou s’ils ne causent pas bien, ou s’ils s’obstinent à ne pas causer du tout. Comme le roi de Vireloup aime à chasser au renard, et d’ailleurs n’aurait pas le temps de suivre tous ses enfants pendant toute la journée, il se fait aider par les ministres, qui se font aider par de la force armée, des douaniers et des prêtres : en sorte que je le comparerais volontiers à un tendre père qui s’entourerait de domestiques fidèles et d’instituteurs estimables.

Et cependant, ce qu’on aurait peine à croire, le roi de Vireloup avait tels de ses enfants qui le chagrinaient, et bien souvent, à ce qu’on m’a rapporté, étaient cause qu’à la chasse même, où il prenait tant de plaisir, il y avait des moments où il s’asseyait sous un arbre, pour éprouver de la douleur de leur conduite, quand il était fatigué. C’étaient, pour la plupart, des enfants babillards, ergoteurs, ingrats, ricaneurs, indociles, qui, au lieu de se croire heureux sous un tel père, s’obstinaient à penser qu’ils étaient malheureux. Le roi, toujours bon et indulgent, les faisait emprisonner dans ses cachots royaux de correction ; mais s’ils babillaient là-dessus, ou en écrivaient à leurs amis, il était sans pitié, et avait des moyens de les faire disparaître sans qu’on sût bien comment. En sorte que je le comparerais à un père, tendre à la vérité, mais prudent, qui sent que la sévérité est quelquefois un devoir.

Or il était arrivé que ceux de Balabran, qui est une province frontière touchant au pays de Ginvernais, s’étaient beaucoup gâtés par le contact avec le voisin, faisant contrebande de culottes, de sucre, de café, et surtout d’idées prohibées dans tout le Vireloup ; car il faut savoir que, dans le Ginvernais, où autrefois le gouvernement était paternel aussi, ils se sont émancipés de telle façon, que là c’est le roi qui est l’enfant de ses sujets lesquels entendent qu’il tienne tout d’eux, son argent et son pouvoir, et ne fasse pas un mouvement de jambe, de bras ou de corps, que ceux qui sont prévus par la grande Pancarte, qui est leur pacte social. C’est ce qui rendait les Ginverniens mauvaise compagnie pour les gens de Balabran, en sorte que ceux-ci se gâtaient à vue d’œil, au grand déplaisir du roi leur père, qui avait résolu d’y mettre ordre. D’où je le comparerais à un père, tendre à la vérité, mais qui fustige une portion de ses enfants, pour le plus grand bien des autres.

C’est par suite des mesures prises à ce sujet, que



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