Vers un nouvel ordre du monde by Gérard Chaliand

Vers un nouvel ordre du monde by Gérard Chaliand

Auteur:Gérard Chaliand [Chaliand, Gérard]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Seuil
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00


Le tournant de l’AKP

L’AKP (Parti de la justice et du développement) de Recep Tayyip Erdoğan l’emporte aux élections de 2002. Son succès marque l’échec d’une vingtaine d’années de clientélisme, de corruption et de scandales impliquant l’écrasante majorité de la classe politique.

Mais la seconde guerre américaine contre l’Irak est l’occasion d’une crise turco-américaine : la Turquie, en effet, refuse de laisser les troupes américaines utiliser son territoire pour intervenir en Irak par le Nord. La perspective d’un Kurdistan irakien autonome inquiète alors Ankara.

Les négociations pour l’adhésion de la Turquie à l’Union européenne s’ouvrent officiellement en 2005. Dix ans auparavant, une union douanière avait été entérinée. L’avancée de ce processus est lié à certaines conditions (Chypre, droits de l’homme, droits des minorités, etc.). Près d’une décennie plus tard, cette adhésion n’a guère avancé, mais l’affaire n’est pas close pour autant. En politique extérieure, la volte-face turque dans ses rapports avec Israël est régionalement capitale. N’ayant aucun contentieux avec l’État d’Israël depuis la naissance de celui-ci – ce qui était aussi le cas de l’Iran jusqu’à la chute du Shah en 1979 –, la Turquie avait été jusqu’à effectuer des manœuvres militaires communes avec l’État hébreu et la Jordanie. Ce rapprochement avait d’abord pour but de gagner l’appui du groupe de pression pro-israélien à Washington afin d’appuyer la candidature de la Turquie à l’Union européenne.

La montée en puissance de l’économie turque, les réticences déclarées de certains États européens et la nouvelle diplomatie turque ont contribué à modifier le positionnement du pays. D’autres facteurs ont également joué : l’évolution de l’opinion publique turque, l’attitude arrogante, dès 2002, de l’administration américaine sous la présidence de George W. Bush, enfin le problème palestinien lui-même. C’est ainsi que l’opinion, en Turquie, réagit fort mal à l’intervention israélienne à Gaza12 en 2008. Les relations se détériorèrent et atteignirent même un point de rupture en 2010 avec l’épisode du Mavi Marmara, un navire turc destiné à briser le blocus israélien en apportant des vivres à Gaza. L’assaut maladroit mené par les commandos israéliens se solda par neuf morts du côté turc. Du coup, la Turquie de Recep Tayyip Erdoğan s’attira toutes les faveurs de l’opinion publique arabe et apparut comme le représentant actif d’une cause qui n’était plus soutenue que verbalement par les États arabes du Moyen-Orient. Le prestige attaché à une indiscutable réussite économique fit le reste.

Du coup, les médias occidentaux, d’une façon générale, présentent la réussite turque comme exemplaire en oubliant que la Turquie, en matière de droits de l’homme, est loin du compte. Et au Moyen-Orient, on cite en exemple le « modèle turc » sans s’interroger sur le rôle qu’a pu jouer la rupture kémaliste dans cette réussite.

Pour les États-Unis, la Turquie est un allié de poids et à des titres divers. C’est ainsi que Washington, quelle que soit l’administration en place, a toujours soutenu la candidature de la Turquie à l’entrée dans l’Union européenne. Il faut dire que le pays a toujours été, quelles que soient les ententes circonstancielles nées d’intérêts géographiques ou économiques liés aux hydrocarbures, un adversaire de la Russie comme de l’Iran.



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