Une oeuvre à vivre by Michèle B. Tremblay

Une oeuvre à vivre by Michèle B. Tremblay

Auteur:Michèle B. Tremblay [Tremblay, Michèle B.]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Roman d'époque
Éditeur: Les Éditeurs réunis
Publié: 2022-02-25T05:00:00+00:00


25

Oui, combien d’expériences sont nécessaires pour ne plus commettre la même erreur ? Une, deux, trois…

Au début du printemps suivant, Lauréanne s’occupe de nettoyer le grand jardin derrière la maison en compagnie d’un homme d’entretien. C’est fou ce que l’hiver peut apporter de déchets poussés par le vent, se dit-elle comme chaque début de saison.

— Madame Desgagné, vous êtes demandée au téléphone, lui crie l’aide-ménagère engagée pour le grand ménage du printemps.

Elle saisit le combiné et après quelques échanges, elle reconnaît au bout du fil Alfred Simard, son guide de Roberval.

— J’ai capturé une belle petite moufette de trois semaines, lui apprend-il d’une voix réjouie. Je l’ai gardée pour vous.

— Heu, je ne sais pas trop pour le moment, répond Lauréanne, que la proposition embarrasse.

La voilà en effet un peu prise au dépourvu ! Elle lui a tant parlé de son amour des animaux lors de son dernier voyage de chasse l’automne dernier qu’il pense ainsi lui faire vraiment plaisir. Mais elle s’est pourtant promis de ne plus adopter d’animal sauvage.

— Envoyez donc ! insiste le guide, vantant la beauté de la bête. J’ai tu-suite pensé à vous quand je l’ai vue. Vous allez l’aimer, chus sûr de ça.

Il paraît si heureux de lui offrir ce cadeau que finalement, elle n’ose pas le décevoir.

— Oui, d’accord, se résout-elle à dire. J’irai la chercher demain, merci beaucoup.

En raccrochant, elle se reproche immédiatement sa réponse. J’aurais dû dire non. Qu’est-ce qui m’attend encore avec cette bête ?

De retour le lendemain après-midi à Chicoutimi avec la moufette, Lauréanne commence par lui donner un bain. Léonce, les filles, le chien, le chat, tous l’entourent, très animés. C’est la fête dans la maison. Sitôt sortie de la baignoire, elle se met à courir partout, passant d’une pièce à l’autre, poursuivie par toute la famille, excitée de voir une aussi jolie bête dans la maison.

Le lendemain, Lauréanne prend rendez-vous avec le vétérinaire Fraser pour l’opération.

— Trois semaines, c’est trop jeune, lui explique-t-il au téléphone, les risques sont grands qu’elle meure à l’anesthésie. Le cœur ne résistera pas.

— On prend le risque, répond Lauréanne, bien décidée. Je serai là demain.

Si elle meurt, ce sera peut-être mieux ainsi, se dit-elle en se sentant un peu hypocrite. Quand même ! Il n’est pas question qu’elle prenne le risque que la moufette envoie son liquide nauséabond dans la maison. Elle n’a pas beaucoup confiance en ce qui peut advenir de tout cela, et elle s’en veut encore d’avoir accepté ce cadeau. Pour pas déplaire, me voilà encore responsable d’un animal sauvage ! maugrée-t-elle intérieurement.

* * *

— Vous allez lui donner une petite goutte de chloroforme si elle bouge, juste une goutte, pas plus que ça, indique le Dr Fraser à Lauréanne, qui l’assiste pour l’opération.

Au grand étonnement du vétérinaire, tout se déroule normalement et Lauréanne repart avec la moufette dans sa cage.

Trois jours plus tard, en désinfectant la plaie laissée par l’opération, Lauréanne se rend compte que la guérison est presque achevée. La moufette va bien, elle mange et court partout avec le chien et la chatte.



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