Trois étoiles et un meurtre by May Peter

Auteur:May, Peter [May, Peter]
La langue: eng
Format: epub
Tags: Policier
Éditeur: Éditions du Rouergue
Publié: 2019-07-17T04:00:00+00:00

Chapitre 21

Enzo rabattit le couvercle de l’ordinateur et s’enfonça dans le canapé. Deux récits totalement différents du même moment. D’après Guy, son frère l’avait appelé le jour même où il avait appris la nouvelle ; derrière lui, des gens faisaient la fête.

D’après Marc, cette conversation téléphonique avait eu lieu quelques jours plus tard. Guy avait déjà reçu sa lettre.

En substance, les deux rapportaient la même information, les mêmes émotions. Seuls les détails changeaient. Or Enzo savait que la mémoire joue souvent des tours. Des évènements successifs peuvent se retrouver condensés en un seul. Plusieurs conversations en une seule. Lorsque Guy disait avoir entendu des gens en train de faire la fête derrière Marc, cela sonnait juste. Ce n’est pas le genre de détail qu’on invente. Peut-être qu’une célébration plus officielle avait été organisée à ce moment-là. Quoi qu’il en soit, rien ne permettait de mettre en doute le récit de Marc, sa lettre à son frère, le coup de fil de ce dernier, leurs retrouvailles émues.

En fait, rien ne permettait de douter de l’un ou l’autre récit. Enzo décida de concentrer plutôt ses réflexions sur l’addiction de Marc au jeu, qui lui paraissait une piste plus prometteuse.

Un léger coup frappé à la porte le fit sursauter. Il regarda sa montre. Onze heures passées. Si c’était encore Guy avec sa mirabelle, il devrait trouver une façon diplomatique de le renvoyer. S’arrachant péniblement au canapé, il traversa la pièce et entrebâilla la porte. Le rai de lumière s’échappant de sa chambre éclaira le visage surexcité de Sophie, debout dans la pénombre du couloir. Aussitôt, il ouvrit en grand pour la laisser entrer. L’air froid du dehors la suivit.

– J’ai du nouveau, papa, lâcha-t-elle, les yeux brillants d’excitation.

– Ah bon, fit Enzo tout en passant devant elle pour récupérer son verre de whisky sur la table basse.

Depuis sa rencontre avec Philippe, il ne se sentait pas vraiment bien disposé envers sa fille.

– Tu n’es pas curieux de savoir ce que c’est ?

– Si.

Il but une gorgée de whisky. Outrée, Sophie protesta :

– Et moi, alors ?

– Sers-toi, dit-il en désignant le frigo avec le menton.

Elle déboucha une bouteille de chablis et remplit un verre avant de s’exclamer avec le même enthousiasme qu’en arrivant :

– Tu ne devineras jamais !

– Non, raconte.

– Tout le monde savait que Marc et Anne Crozes avaient une liaison, d’accord ?

– À ce qu’il paraît.

– Mais ce qui se sait moins, c’est qu’ils ont rompu juste avant la mort de Marc !

Enzo fronça les sourcils :

– Et toi, comment le sais-tu ?

L’air triomphant, légèrement suffisant, elle répondit :

– J’ai cuisiné le maître d’hôtel.

– Patrick ?

– Oui. Je crois qu’il a flashé sur moi.

Les lèvres pincées, Enzo lui jeta un regard sévère :

– Ça devient dangereux de te laisser seule, on dirait.

L’œil pétillant, elle se mit à rire.

– En tout cas, j’ai réussi à lui tirer les vers du nez après déjeuner. Il aime bien boire, Patrick. Et aujourd’hui, il avait peut-être bu un ou deux verres de trop.

– Encouragé par toi, sans doute.

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