Trilogie Morgenstern 2 Un Tango du Diable by Hervé Jubert

Auteur:Hervé Jubert [Jubert, Hervé]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Fantasy, Jeunesse, Fantastique, Steampunk
Éditeur: Albin Michel
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00

Roberta découvrit Plenck penché sur sa table de dissection. Une des armoires était grande ouverte. À part ce détail, le terrier n’avait pas changé depuis l’autopsie de Martha Werber.

– Tu es bien mal en point, marmonna le légiste. Qu’allons-nous faire de toi ?

Roberta, qui était entrée sans frapper, ne voyait ni les

jambes ni la tête du cadavre sur lequel il travaillait. Était-il en train d’autopsier un enfant ?

– Et ta queue… Elle est tout effilochée. Ce sont les traceurs qui t’ont mis dans un état pareil ? Leur influence est définitivement néfaste.

La sorcière éprouva le besoin urgent de manifester sa présence.

– Hum, hum, fit-elle.

Plenck se retourna, la vit et un franc sourire illumina ses traits. Un de ses animaux empaillés était posé sur la table. Un blaireau, à vue de nez, naturalisé en flagrant délit de fouissement. Mais Roberta n’était pas très calée côté mammifères à fourrure.

– Tu sais que ce satané Baron ne laisse pas une minute de libre au dernier taxidermiste de Bâle ? se plaignit Plenck en donnant un coup de brosse à la bestiole. Je regretterais presque les chinchillas. Pourtant, il n’y a pas plus pénible à nettoyer.

Il rangea le blaireau dans l’armoire et en sortit une zibeline. L’espèce de ragondin blanc comme neige montrait les dents au chasseur qui, de toute évidence, avait fini par lui trouer la peau.

– J’ai fini les autopsies au petit matin. La peste soit des tueurs en série ! Que font-ils des arrangements syndicaux que nous avons eu tant de mal à faire valoir auprès de nos employeurs ? (Il posa la zibeline et la fit tourner sur son socle.) Regarde-moi ça ! (La fourrure suivait les mouvements de ses doigts par vagues magnétiques.) Les traceurs stressent mes petits protégés. Ils les chargent en électricité.

Roberta s’assit et se fit une anglaise, triturant une boucle de ses longs cheveux roux entre deux doigts. Plenck monologuait et brossait le dos de la bestiole avec vigueur, tentant de mettre un semblant d’ordre dans le massacre.

– J’ai analysé la matière qui recouvrait Martha Werber, continua-t-il tout en travaillant. C’était bien du miel. Du miel commun, mais naturel à cent pour cent. Comme on n’en trouve que très difficilement à Bâle. Les rares marchands à en vendre ont sans doute reçu la visite de nos amis miliciens. (De fugaces éclats bleutés s’allumaient dans la fourrure sous les coups de brosse énergiques.) Quant aux victimes du charnier, elles ont été noyées lentement. Une fin terrible.

Il rectifia une houppette et gratta affectueusement le crâne de la zibeline à nouveau bonne pour le service. Il la rangea dans l’armoire et hésita entre un porc-épic et un bébé tatou avant de porter son choix sur un écureuil volant aux membranes déployées. Il s’immobilisa à mi-chemin de la table de dissection, le polatouche dans une main.

– Au fait, tu es juste venue me dire bonjour ou tu me réserves de nouvelles surprises ?

– J’aimerais que tu me révèles les arcanes de la génétique. Et vite. J’ai rendez-vous dans une heure sous le Baromètre.

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