Thomas Cook - 1818-1892 - L'Inventeur des voyages by Philippe Alexandre & Béatrix de l'Aulnoit

Auteur:Philippe Alexandre & Béatrix de l'Aulnoit [Alexandre, Philippe & l'Aulnoit, Béatrix de]
La langue: fra
Format: epub
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00

Au sud de Hyde Park se dresse déjà le grand bâtiment destiné à accueillir les exposants du monde entier. Jusqu’à la Tamise, ce quartier de Brompton est en pleine rénovation. Après avoir loti Eaton Square, l’architecte Charles James Freake vient de terminer, dans Fulham Road, une série d’habitations bon marché dont les plans sont copiés sur ceux d’une maison modèle de deux étages à la façade blanche, dessinée avant sa mort par le prince Albert lui-même. Chacun de ces immeubles comprend cent pièces réparties en appartements de deux ou trois chambres avec un grand vestibule commun. Dès sa première visite, Cook en loue un et investit 1 000 livres6 pour le meubler. Dans The Excursionist du 8 avril 1862, il le propose aux « clubs ou familles de deux à six personnes et visiteurs des deux sexes qui souhaiteraient venir à Londres pour l’Exposition ». Avantage : les lieux n’ont jamais été habités et les prix sont modestes : 2 shillings7 pour une chambre avec grand lit et breakfast.

Le 30 avril 1862, veille de l’inauguration, Thomas organise devant l’immeuble un meeting du Mouvement anti-alcoolique. La fanfare de Chelsea est là. À la fin des discours, une banderole est hissée sur la façade : « Maison des visiteurs de l’Exposition ». Le succès est immédiat. Après quelques jours, les quatre-vingt-dix lits ne suffisent plus. Cook loue le bloc de maisons voisin et encore un troisième de l’autre côté de la rue.

C’est une véritable internationale ouvrière que ces hôtels. Cinq cent quarante travailleurs viennent de Bradford, suivis d’autres des houillères, des usines textiles et chimiques des Midlands ou de la chocolaterie Fry & Son de Bristol. Parfois, ce sont les patrons qui décident d’envoyer leurs employés voir les nouvelles inventions. Plusieurs groupes arrivent de Paris et d’autres grandes villes françaises comme Toulouse. Soixante Allemands du Mecklembourg restent deux semaines et quarante Italiens de Turin retiennent leurs chambres pour quarante jours. Arrivées de Leicester, Marianne et Annie, qui a maintenant dix-sept ans, veillent à tout. Les 29, 30 et 31 mai, dans la grande salle du restaurant, deux éminents spécialistes venus de New York donnent trois conférences sur la phrénologie, l’étude du crâne et du cerveau, alors très en vogue. Pour les remercier, Cook les invite à visiter l’Écosse.

En face de l’Exposition, dans le grand Bazar international, il a ouvert un stand, décoré de têtes de cerf, royalement baptisé Scotch Court. Au milieu de tartans, de biscuits à l’avoine, de guides de tourisme, de gravures du prince Albert, il vend des billets pour de romantiques excursions dans les Highlands. On y trouve même un élégant costume en tweed d’Aberdeen spécialement adapté aux longues marches dans les bruyères et qu’il appelle en toute simplicité du nom de son journal : Excursionist.

Cet as de la publicité s’adresse aussi à une clientèle plus aisée qu’il loge dans une demi-douzaine de maisons qualifiées de « sélectes ». Celle où il habite est placée « sous la surveillance directe de M. et Mme Cook », une garantie de sérieux et d’efficacité.

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