Rivage des intouchables by Berthelot Francis

Rivage des intouchables by Berthelot Francis

Auteur:Berthelot, Francis [Berthelot, Francis]
La langue: fra
Format: epub
Tags: sf
Éditeur: Teur
Publié: 2015-01-15T17:37:35+00:00


Porte qui s’ouvre en rabotant le sol. Lumière du dehors, comme un coup de poing dans les yeux. Mots qui se bousculent sans parvenir à prendre un sens.

— Qui ça ? demande Cassiãn en plissant les paupières. Où ça ?…

— Juste à l’angle, répète Georg. Sur les presque-passerelles qui mènent à la place d’eau. Aidez-moi à le transporter ici. Après tout, c’est avec vos élixirs qu’il s’est démoli !

— Barnãbé ? grogne Võrgh, décidément mal réveillé. Ça m’étonnerait ! Il n’a pas mis les pieds à l’Écaille d’Encre de la soirée.

— En attendant, il est ivre mort, à deux pas d’ici. Il vous tient pour un ami, non ? Vous n’allez pas le laisser crever en pleine rue !

— Évidemment !… Sa poésie, je n’ai pas eu besoin de vos cours pour la comprendre. Il aura voulu épater ses oiseaux en volant aussi haut qu’eux. Et l’atterrissage a été plus dur que prévu… Voilà l’histoire !

Il est neuf heures du matin. Une brise opiniâtre s’affaire à assainir les ruelles, sales et empuanties. Seul, le bras autour d’un balustre cassé, Barnãbé gît au bas de l’escalier, plus nu que nature, dans la froideur des marches semi-liquides. Une fiente de pigeon s’étale sans façon sur sa poitrine. Sa figure, d’ordinaire joviale, est crispée comme un masque. Et par la fente de ses yeux passe un regard moite, bouillonnant de visions mauvaises.

— Il n’est pas saoul, déclare Cassiãn après lui avoir posé la main sur le front. Il a une fièvre de cheval. Vous me direz qu’après ses exploits équestres, ça n’a rien d’étonnant… Bon ! Prenez ses pieds, je me charge du reste. Il lui faut un médecin.

— Moi, c’est d’un café-râpé que j’ai besoin ! dira Olev en débarquant, une heure plus tard, la rousseur réjouie et des poches sous les yeux. Sinon, au lieu d’une épave, vous en aurez deux sur les bras. Où l’avez-vous mis ?

— Là-bas, entre la couverture et la banquette. Sous la vessie à glace. Il ne risque pas de s’envoler, le malheureux !

Un air ensoleillé entre à flots par les fenêtres, chassant les remugles de sueur, d’éthers, toute cette moiteur dont on ne sait trop si elle stagne dans l’atmosphère, ou seulement dans les mémoires. L’odeur du café-râpé achève la métamorphose. Il fait bon, à présent, et calme, et un peu las. Arthur est descendu de l’appartement, affublé d’un kimono de corde. Tout en mâchonnant ses copeaux, il guette sur les traits du dermato-juge un diagnostic qui tarde.

— Je crois qu’il nous a inventé une maladie ! glousse enfin Olev, après avoir examiné Barnãbé sous toutes ses coutures. Et du genre succulent, encore… Sa peau est poisseuse comme un pot de confitures, à croire que les écailles se décomposent. Et les parties pigmentées ne valent guère mieux. Il faut le ramener chez lui, et faire des analyses. Où demeure-t-il ?

Un type qui vend des perruches dans les cimetières, et dont personne ne peut dire s’il est gurde ou yrvène, comment saurait-on où il vit, ni même s’il habite quelque part ?

— Très bien, tranche le rouquin.



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