Regain by Giono Jean

Auteur:Giono, Jean [Giono, Jean]
La langue: eng
Format: epub
Éditeur: Le livre de poche
Publié: 2011-07-13T23:02:07+00:00

DEUXIÈME PARTIE

I

— Cette saloperie de terre… dit Panturle en entrant… pas moyen… c’est plus dur que la pierre. On l’a trop laissée d’abandon… elle est là, toute verrouillée ; on ne peut pas seulement enfoncer le couteau.

Il regarde sa charrue : c’est une petite charrue de pauvre, une de ces charrues que l’homme tire en se renversant en arrière.

— Qu’est-ce que tu veux faire avec ça ? Ça griffe juste un peu le dessus.

Arsule est dans le plein du souci avec cette nouvelle. Elle regarde Panturle, la charrue, et cette bosse du coteau qui se gonfle au-delà de la fenêtre.

— Et alors ?

— Oh ! alors, dit Panturle, tout compte fait, puisque, d’une façon ou de l’autre, il faut que j’aille là-bas pour la semence et voir pour Caroline je vais y aller ce jour. Je passerai par chez Jasmin pour toucher le père Gaubert. Celui-là, il a le sort de la charrue. Je lui dirai qu’il m’en fasse une ; il me la fera volontiers : c’est sa passion. Je demanderai à l’Amoureux s’il veut me prêter son cheval. C’est de bonne heure. Ils n’ont pas encore commencé, ça pourra faire. Tu verras.

— Si donc tu y vas de cette heure, dit Arsule, mets-toi un peu une chemise propre.

Le grand pétrin est rangé sous la fenêtre. La table est dans le coin, toute luisante, toute lavée, comme une grande roche carrée après la pluie. Le devant de l’âtre est net. Il y a trois assiettes pas pareilles sur la planchette de l’évier. Sur le manteau de la cheminée, il y a une boîte d’allumettes. C’est de cette boîte que tout est art.

Avant, il battait briquet avec de la pierre noire et de l’étoupe ou de la moelle d’arbre. Ça prenait ou bien non. Fallait un moment et de la patience, et des « saloperies de sort » pas mal. Arsule un jour a dit : « Si on avait des allumettes… »

Panturle est parti de bonne heure par les collines et, au moment où ça a été l’aube, il était déjà sur la route, là-bas, de l’autre côté, presque en vue du clocher de Vachères. Là, il a attendu le courrier. Il a arrêté la voiture et il a fait descendre Michel.

— Viens un peu, que je te dise quelque chose : tu ne me vendrais pas cette peau de lièvre ?

Et le Michel :

— Ça peut se faire.

Il y avait dans la voiture le gros Sauteiron, celui qui vend des chevaux ; il a crié :

— Amène-la ta peau.

Il en a donné six francs. Panturle a dit :

— Ça va.

Et le Michel a ajouté :

— C’est pas cher ; quand tu en auras d’autres, garde-m’en une à ce prix. Je veux me faire une casquette.

Panturle a donné les six francs au Michel :

— Voilà, tu m’achèteras des allumettes, des grosses boîtes.

— Pour tout ça ?

— Oui. Je t’attendrai là, ce soir.

Comme ça. Arsule a eu ses allumettes. Elle a été bien contente. Elle les a placées dans le placard sec.

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