Prison House by John King

Prison House by John King

Auteur:John King [King, John]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Au Diable Vauvert
Publié: 2018-04-04T16:00:00+00:00


Le temps passe plus lentement que jamais et après une semaine au bloc je n’ai toujours pas eu de vraie nuit de sommeil, toujours pas parlé avec un codétenu. L’homme qui occupe le lit à ma droite a bien hoché la tête une fois, mais quand j’ai essayé de lui parler il m’a tourné le dos. Ce n’est pas qu’un problème de langue. On a là la lie du système carcéral, des pervers qui blessent et violent et méprisent l’innocence, prisonniers de leur cruauté, ajoutant à la torture de la chair celle de l’esprit. J’attends dans la file et prends ma bouffe, au moins le Chef a un demi-sourire, mais il a une expression comme ça pour tout le monde excepté les monstres qui refusent son monde de graisse et de bromure et de travail bien fait, et je m’assieds sur mon lit ou sur le rebord de la cour, fais durer chaque bouchée deux fois plus longtemps qu’au Bloc-C, mâche encore plus lentement qu’au ralenti, lave mon bol jusqu’à ce que le plastique brille comme de l’acier, mais seulement après que les autres ont fini, mouton noir ostracisé par le reste de la meute. Débile Débile est un mouton noir lui aussi mais il est en sécurité dans son havre d’allumettes, d’autres exclus acceptent les coups de poing et les coups de pied qu’on leur met sans raison, baissent humblement la tête sans jamais rien répondre, acceptation puérile qui me fait fulminer. Je pars en safari et remarque à peine la puanteur, les sens s’émoussent, je m’accroupis et sens l’humidité de ma peau, sans plus savoir si elle vient de l’intérieur ou de l’extérieur, et au lavabo je frotte chaque pore d’eau glacée, mouillant mes vêtements et m’en foutant, frissonnant et sombrant plus profondément. Je fixe le plafond et observe les insectes, chasseurs et bombardiers en spirales et drones sans âme, écoute les moustiques tirer à la mitrailleuse lourde, sors et traîne dans la cour qu’il fasse un froid glacial ou tout simplement normal, et je sais que je vais bientôt craquer, me demande combien de temps quelqu’un de bien peut tenir comme ça, à trois reprises de la salive tombe sur ma nuque, visages durs et sourires mauvais, regards inexpressifs qui narguent, et au moins au mitard il n’y aurait pas de menace. Il y a une chanson qui dit qu’on ne sait pas ce qu’on a tant qu’on ne l’a pas perdu et un dicton sur l’herbe qui est toujours plus verte, et je sais que j’aurais dû rester à ma place et me rendre compte de la chance que j’avais. Il y a une partie de moi qui voudrait se dresser et les prendre tous d’un coup, obliger ces putes à soit me parler soit me tuer, soit me faire comprendre leur langue soit me faire taire à jamais, mais le refus de souffrir en silence, ça déchaînerait la populace, et je n’aurais aucune chance, comme un nègre arrogant qui oserait résister à ses lyncheurs, et



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