L'oeil du chat - tome 1 by Fortuné Du Boisgobey

L'oeil du chat - tome 1 by Fortuné Du Boisgobey

Auteur:Fortuné Du Boisgobey [Boisgobey, Fortuné Du]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Policier, Roman
Publié: 1888-07-03T23:00:00+00:00


Chapitre 6

L’hôtel de Pommeuse n’était pas très vaste, mais, au fond du jardin, la comtesse avait, depuis son veuvage, fait construire une serre qui était une vraie merveille.

Elle y avait rassemblé toutes les plantes des tropiques, et elles y poussaient si vigoureusement qu’on aurait pu s’y croire dans une forêt vierge.

On y marchait sur le sable le plus fin et on pouvait s’y asseoir sur des sièges confortables.

Au milieu des verdures, un jet d’eau jaillissait d’une vasque de marbre blanc et un ruisseau bordé de mousse courait à travers les arbustes.

C’était dans ce palais vitré que madame de Pommeuse se tenait de préférence lorsqu’elle ne recevait pas et il lui arrivait d’y rester des journées entières, même en hiver, car un excellent calorifère y entretenait constamment une température printanière et le soleil, dès qu’il lui plaisait de se montrer, l’illuminait de ses rayons.

Il brillait ce jour-là ; le soleil et les fleurs étaient en fête, mais la comtesse ne regardait ni le ciel bleu, ni les camélias blancs. Elle errait tristement par les allées et ne paraissait pas goûter le charme d’une douce matinée de mars.

C’était le surlendemain de sa visite à la Morgue et elle n’avait pas encore eu le temps de se remettre complètement des émotions de ce malencontreux voyage à la maison des morts.

Elle en était pourtant revenue sans accident et, à peine rentrée, elle avait donné à ses gens l’ordre de n’admettre personne, de sorte qu’elle venait de passer quarante-huit heures dans la solitude la plus absolue.

Cette réclusion volontaire était un événement dans sa vie, car elle aimait beaucoup à sortir, plutôt à pied qu’en voiture, et plutôt pour aller voir ses pauvres que pour rendre des visites ou pour se montrer au Bois.

Mais sa dernière promenade lui avait si mal réussi et si fort donné à réfléchir qu’il ne lui tardait pas de reprendre ses habitudes et que le temps ne lui avait pas paru long.

Elle l’avait employé à se recueillir, à faire son examen de conscience et à consulter son cœur.

Elle sentait que jusqu’alors elle n’avait pas vécu, que le passé n’était plus qu’un rêve et que des résolutions qu’elle allait prendre dépendait l’avenir de son existence, brusquement bouleversée par une catastrophe.

Madame de Pommeuse n’avait que vingt-cinq ans et, par conséquent, son histoire n’était pas longue.

Elle s’appelait Grelin, du nom de son père, Octavie Grelin, et ce nom très plébéien, elle l’avait porté jusqu’à son mariage ; mais elle était vraiment née pour être comtesse, car la distinction de ses sentiments égalait la distinction de sa personne.

Elle méritait certainement d’épouser un seigneur aussi titré et mieux posé que ce comte de Pommeuse, gentilhomme authentique, mais ruiné et quelque peu déconsidéré par ses pairs – un déclassé de l’aristocratie.

C’était son père qui l’avait mariée, presque au sortir d’un pensionnat, où elle avait passé tristement son enfance et toute sa jeunesse.

Ce père l’y laissait pour des raisons qu’elle n’avait jamais bien connues. Il allait l’y chercher le dimanche et, à l’époque des vacances, il la menait aux bains de mer dans un trou de la côte normande, où ils ne voyaient absolument personne.



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