L'invasion des profanateurs by Finney Jack

L'invasion des profanateurs by Finney Jack

Auteur:Finney, Jack [Finney, Jack]
La langue: fra
Format: epub
Tags: sf
Éditeur: Denoël
Publié: 2014-06-02T22:00:00+00:00


CHAPITRE XII

J’ignore si beaucoup de gens, à notre époque, vivent encore dans leur ville natale. C’était mon cas, et il est d’une tristesse inexprimable de voir mourir une ville ; c’est bien pire que la mort d’un ami, car on a toujours d’autres amis sur lesquels s’appuyer. Nous avions des masses de choses à faire, et des masses de choses se produisirent dans les deux heures suivantes ; de minute en minute je me sentis plus déprimé et plus triste, car je savais que ce que j’avais tant aimé et aimais toujours était irrémédiablement gâché. Alors que nous roulions dans une rue de la périphérie, je ressentis pour la première fois les terribles changements qui s’étaient produits à Mill Valley, ce qui me rappela les propos d’un oncle qui avait fait la guerre en Italie. L’armée pénétrait dans une ville libérée des Allemands, à la population supposée amicale. Mais les troupes y arrivaient l’arme au poing, les hommes regardant tout autour d’eux, avançant avec crainte et précaution. Chaque porte, chaque fenêtre, chaque impasse, chaque visage était pour eux une menace. Et moi, ce jour-là, de retour dans la ville où j’étais né – j’avais livré des journaux dans cette même rue – je comprenais ce qu’il avait éprouvé en arrivant dans ces villages italiens ; je redoutais ce que je pourrais voir et découvrir.

« Miles, me dit Jack, je voudrais m’arrêter cinq minutes à la maison. Teddy et moi avons besoin de nous changer. »

Je n’avais aucune envie de les accompagner ; j’avais peur des pensées et des sentiments qui m’envahissaient, et voulais voir cette ville, l’examiner de près et tâcher de me convaincre qu’elle n’avait pas tellement changé en réalité. Nous étions samedi, mon cabinet était fermé, et je dis : « Déposez-nous ici, Jack. Nous allons marcher un peu, si ça n’ennuie pas Becky, et on se retrouvera tous chez moi. »

De sorte que Jack nous laissa dans Sycamore Avenue, à dix minutes de marche de chez moi. C’est une rue résidentielle tranquille, comme la plupart de celles de Mill Valley, et tandis que le bruit de la voiture de Jack s’éloignait, Becky et moi nous dirigeâmes tranquillement vers Throckmorton Street ; on ne voyait âme qui vive, le silence était total, seulement rompu par le bruit de nos pas sur le trottoir ; l’atmosphère pouvait sembler paisible…

Nous remontâmes une demi-douzaine de pâtés de maisons, parlant peu, et j’eus le temps de bien regarder. Je parcourais tous les jours les rues de Mill Valley ; j’étais venu dans ce quartier une semaine auparavant. Et tout ce que je voyais maintenant existait déjà huit jours plus tôt, mais on ne prête aucune attention particulière aux endroits familiers, à moins d’y être poussé. On ne remarque rien, à moins d’avoir une bonne raison pour le faire. Ce jour-là, j’avais une bonne raison, et je regardai attentivement la rue et les maisons qui la bordaient, en essayant d’analyser mes impressions.

Il me serait impossible d’expliquer sur quoi reposait mon sentiment que tout était différent ; or tout l’était, sans que je puisse l’exprimer.



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