L'empire d'ivoire by Novik Naomi

Auteur:Novik, Naomi [Novik, Naomi]
La langue: fra
Format: epub
Tags: fantaisy
Publié: 2010-07-20T10:46:52+00:00

Ayant vraisemblablement décidé qu’ils étaient fous, ou en tout cas extrêmement riches, Demane ne voulut plus entendre parler de cauris mais demanda plutôt à être payé en bétail, apparemment la principale source de richesse chez les Xhosas : il ouvrit les négociations à douze têtes.

— Dites-lui que nous lui donnerons une vache pour une semaine de service, rétorqua Laurence. S’il nous conduit à un endroit où l’on trouve beaucoup de champignons, nous envisagerons d’étendre cet accord, sinon nous les ramènerons ici tous les deux avec leur paiement.

Demane inclina la tête et accepta cette contre-proposition avec un fatalisme raisonnablement convaincant ; mais les yeux écarquillés du petit garçon, qui s’appelait Sipho, et l’excitation avec laquelle il tirait sur la main de Demane firent deviner à Laurence qu’il avait passé un bien mauvais marché, selon les critères locaux.

Téméraire rabattit sa collerette en arrière en voyant approcher le chien terrorisé.

— Il est très bruyant, commenta-t-il d’un air désapprobateur.

Ce à quoi l’animal répondit quelque chose de tout aussi impoli, à en juger par le ton, et tâcha de s’arracher aux bras de son maître pour s’enfuir ; Demane semblait à peine moins nerveux. Tendant le bras Mme Erasmus fit mine de tapoter la patte de Téméraire afin de lui montrer qu’il n’y avait pas de danger : peut-être pas le meilleur encouragement possible, car cela attira surtout son attention sur les griffes redoutables ; Demane fit passer derrière lui un Sipho plus intrigué qu’apeuré et, tout en coinçant sous son autre bras son chien fou de terreur, secoua la tête en refusant catégoriquement de venir plus près.

Téméraire inclina la tête sur le côté.

— C’est un son très intéressant, dit-il.

Et il répéta l’un des mots, en reproduisant le claquement de langue avec plus de succès que n’importe lequel d’entre eux, quoique pas tout à fait correctement. Sipho s’esclaffa derrière l’épaule de Demane et lui redit le mot ; après quelques répétitions, Téméraire s’écria : « Ça y est, je l’ai ! », bien que son claquement résonnât curieusement, plus guttural que chez les deux garçons ; réconciliés par cet échange, ils acceptèrent de grimper à bord.

Laurence avait appris de Tharkay, en Orient, l’art de transporter le bétail à dos de dragon en gavant les bêtes d’opium avant de les charger ; mais comme ils n’avaient pas de cette drogue sur eux, ils embarquèrent le chien de force, dans un esprit d’expérimentation douteux, et l’attachèrent au harnais. Il commença par se débattre et tirer sur ses liens, en essayant plusieurs fois de sauter à terre – en vain –, jusqu’à ce que Téméraire décolle enfin ; puis, après quelques jappements d’excitation, il s’assit sur son arrière-train, la gueule ouverte et la langue pendante, en agitant la queue d’un air ravi, beaucoup plus à l’aise que son malheureux maître, lequel se cramponnait anxieusement au harnais et à Sipho, en dépit des sangles qui les maintenaient solidement tous les deux.

— Joli cirque que vous nous ramenez là, railla Berkley, avec un gloussement dont Laurence l’eût volontiers dispensé, quand ils revinrent se poser sur le terrain de parade.

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