Le royaume des maudits by Mario Garrido Espinosa

Auteur:Mario Garrido Espinosa
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Babelcube Inc.
Publié: 2019-10-10T00:00:00+00:00

Chapitre 12

LA CHASSE À LA BÊTE

1

D

esiderio Muélledes Martín avait vécu à La Alpurria del Campo toute sa vie et il se rendit compte aussitôt que les destructions que, dans le pire des cas, pouvait causer un sanglier normal, ne ressemblaient même de loin à ce qu’il observait - perplexe et contenant sa rage - appuyé contre le chambranle de la porte de sa propriété. On aurait dit que dix buffles déments étaient passés, saccageant tout et causant des dommages à toute chose ou animal qui se trouverait sur leur passage... Toutefois, les marques dans le sol, les murs, les planches explosées et les blessures des pauvres bêtes indiquaient, sans aucun doute, que le responsable de ce désastre ne pouvait être qu’un sanglier. De plus, les touffes de poils emmêlées étaient nombreuses ici et là, et cet homme avait arraché la peau de trop de sangliers pour ne pas reconnaître maintenant, à vue d’œil, ce type de pelage.

Desiderio Muélledes était probablement celui qui connaissait le mieux dans tout La Alpurria del Campo ces animaux aux canines assassines. Il les avait observés en maintes occasions tout au long de son existence. Quand il était gamin, il avait pu les étudier pendant que son père les guettait et les encerclait, et ainsi, étant encore très jeune il devint le meilleur chasseur de la contrée. C’est pourquoi il connaissait leurs coutumes et en avait assez de les tuer pendant qu’ils mastiquaient des tubercules, des racines ou des fruits... En plus d’une occasion, il les avait vus manger les écorces des arbres et il en tua un gros et à la grosse tête, pendant qu’il s’envoyait un grand lézard vert... mais jamais il n’avait entendu parler de certains qui, comme celui-ci, se seraient attaqués aux poules, coqs, canards, porcs et vaches. D’autres animaux, comme les perdrix, lièvres et lapins sauvages étaient des proies faciles pour un sanglier, et en les suivant il avait réussi à constater combien facilement ils trouvaient des nichés et des tanières, grâce à leur puissant odorat... mais jamais ils ne s’approchaient des possessions de l’homme pour chercher à manger.

C’était la première fois qu’on voyait quelque chose de semblable dans toute la région.

Il allait partir quand il entendit les plaintes de son chien Caifás. Il se trouvait dans une flaque de sang, coincé contre un mur et entouré par la vache Clodovea, qui, allongée, le tenait au chaud avec son énorme masse. Desiderio fit en sorte que la chère vache - qui avait les meilleurs pis de toute la région - s’éloignât et celle-ci protesta avec un mugissement.

– Qu’est-ce qu’on t’a fait Caifás ? - demanda-t-il à son chien tout en lui caressant la tête.

Mais cette fois, le chien ne lui répondit pas avec un aboiement joyeux et affectueux, comme toujours il le faisait quand son maître lui parlait. Il se contenta de lui lécher la main et de gémir.

Il avait la colonne vertébrale cassée en deux et était incapable de bouger.

Caifás avait été jusqu’à ce jour un chien fidèle, inquiet et très robuste.

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