Le piège d'or by unknow

Auteur:unknow
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Arthaud
Publié: 2021-02-15T00:00:00+00:00

Chapitre XIV

Philip peinait à dissimuler sa joie. Il en avait oublié Bram. Et les Esquimaux à l’extérieur du corral. Et le caractère apparemment désespéré de leur situation. « Son père ! » Il voulut crier, ou danser tout autour de la hutte avec Celie dans ses bras. Mais la métamorphose de la jeune femme, au moment où elle l’avait interrogé du regard, l’obligeait à se contrôler. Il redoutait de voir cette curieuse lumière réapparaître dans ses yeux mauves. Quand elle l’avait scruté, avec tellement de sérieux, un instant plus tôt, cela ressemblait au feu de la suspicion, peut-être même au début de la peur s’il allait trop loin.

Il réalisa sa maladresse. Il n’avait pu dissimuler son soulagement quand Celie lui avait révélé l’identité de l’homme sur le dessin. Cette réaction ne pouvait lui avoir échappé. Il le savait, une femme – peu importe le soleil sous lequel elle était née – reconnaissait intuitivement un sentiment. Cette émotion n’avait besoin d’aucun mot pour être perçue. Et comme un imbécile, il avait choisi ce moment pour parler des munitions.

Il n’y en avait pas d’autres, Celie le lui fit comprendre. Il leur restait seulement les quatre balles chargées dans le revolver. Cette déconvenue ne le perturba pas outre mesure. À choisir, il préférait un bon gourdin à ce revolver pour enfant. Dans l’éventualité d’une nouvelle offensive, un objet capable de repousser les Esquimaux s’avérerait précieux. En cherchant partout dans la hutte, il se souvint des traverses en sapin formant la couchette de Bram. Il en arracha une, longue d’un mètre et grosse comme son poing à une extrémité. De l’autre, elle était suffisamment effilée pour être tenue à pleines mains.

— Maintenant, nous sommes prêts à les recevoir, s’exclama-t-il avant de s’exercer à manier son assommoir au milieu de la pièce. À moins de nous faire rôtir, ils ne franchiront pas cette porte. Je vous le jure devant Dieu, Celie !

Le rouge lui monta aux joues en voyant de quelle manière elle l’observait. Il était impatient de se battre, espérant presque le déclenchement de l’attaque – elle le sentait mais n’était pas effrayée. Son courage la rendait magnifique. Soudain, elle rit doucement, d’un petit rire nerveux, impossible à retenir. Il se tourna pour saisir le chaleureux éclat de ses pupilles. Sa gorge se noua en la voyant le regarder ainsi. Il n’avait jamais vu une personne aussi belle. Il laissa tomber sa massue et lui tendit la main.

— Saluons-nous, Celie, dit-il. Nous sommes amis. Je suis ravi que tu le comprennes…

Elle lui donna sa main sans hésiter. Et malgré la mort, qui rôdait alentour, ils échangèrent un sourire en se regardant droit dans les yeux. Puis elle retourna aussitôt dans sa chambre et, durant une demi-heure, Philip ne la revit plus.

Il pouvait maintenant évaluer la situation calmement. S’il avait suivi sa ligne de conduite, en capturant Bram comme il aurait dû le faire, tout aurait été différent.

Une fois Celie disparue dans sa chambre, Philip observa les déplacements des loups dans le corral. S’il avait d’abord songé à se débarrasser des bêtes de Bram, il les voyait maintenant comme leur meilleure protection.

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