Au revoir les chats ! by Hiro Arikawa

Auteur:Hiro Arikawa
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Éditions Actes Sud
Publié: 2023-10-15T00:00:00+00:00

Il avait tardé à revenir.

Au bout de presque une heure, inquiète, elle était repartie à sa rencontre.

Arrivée sur le rivage, elle avait discerné sa silhouette. Debout au bord de l’eau, il contemplait la mer. Puis il s’était élancé dans les vagues.

Sans même pousser un cri, elle lui avait couru après.

Lui continuait à avancer dans la mer.

— Monsieur Sakamoto !

Il ne s’était pas retourné.

Elle l’avait suivi en courant aussi vite qu’elle le pouvait. Lorsqu’elle l’avait rattrapé, l’eau lui montait jusqu’à la poitrine.

— Revenez ! Arrêtez !

Malmenée par les vagues, elle lui avait pris le bras. Le vent qui soufflait fort recouvrait sa voix.

— Si vous faites ça, que va devenir votre fils ?

— Lâchez-moi !

— Il n’en est pas question !

— Le chat ! avait-il crié. Il va mourir !

Elle s’était tue et avait regardé le tourbillon d’écume qu’il lui montrait. Un chat était en train de se noyer. Ils avaient uni leurs forces pour le repêcher et étaient revenus sur la plage en luttant contre les vagues.

— Il va mal !

Mon père parlait du chat gris trempé qu’il serrait contre lui. Il paraissait inconscient.

— Il a dû boire la tasse.

— On peut faire la respiration artificielle à un chat ?

Il l’avait pris par les pattes arrière et l’avait secoué de haut en bas.

— C’est trop violent !

— C’est comme ça qu’on fait quand un enfant a un bonbon coincé dans la gorge. J’espère que le chat va recracher l’eau qu’il a avalée.

Il avait raison. C’est ce qui s’était produit. Une fois que le chat avait fini de tout expulser, il s’était allongé sur le sable.

— Ramenons-le au gîte, avait-elle suggéré.

— Bonne idée ! Il fait trop froid ici.

Ils grelottaient tous les deux.

De retour au gîte, ils l’avaient douché à l’eau chaude, puis séché avec des serviettes et au sèche-cheveux. Ensuite, ils l’avaient placé dans un carton et avaient pris eux-mêmes une douche. Haruko s’était habillée d’un kimono de nuit qu’elle avait trouvé dans un des placards.

Une fois qu’ils s’étaient réchauffés, le chat avait meilleure mine. Ce n’était plus un chat noyé mais un chat endormi.

— Euh… avait-elle commencé d’un ton hésitant. Désolée pour tout à l’heure. Je me suis méprise sur vos intentions.

— Ne vous en faites pas pour ça !

Mon père était aussi gêné qu’elle.

— C’est tout à fait compréhensible. Vous m’avez d’abord vu sangloter, et quand vous êtes revenue, je courais vers la mer.

Il avait regardé le chat endormi.

— J’ai l’impression qu’il a un problème aux yeux.

— Je crois que vous avez raison. Il doit vivre par ici, je l’ai déjà vu.

— Il vous a suivie quand vous êtes venue sur la jetée. Ensuite il est resté près de moi un moment, et quand je me suis calmé, il s’est éloigné. Il a dû tomber de la jetée.

— S’il m’a suivie, tout est de ma faute.

— Non, de la mienne. Je ne sais pas pourquoi, mais j’ai l’impression qu’il voulait veiller sur moi.

Ils ont continué pendant quelque temps à dire : “non, c’était de ma faute”, “non, de la mienne”.

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