Le Mal de mer by Inconnu(e)

Le Mal de mer by Inconnu(e)

Auteur:Inconnu(e) [Inconnu(e)]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Roman
Publié: 2013-05-07T20:14:48+00:00


V

Il y a encore peu de monde sur la plage. Il trottine pour se rapprocher le plus possible des vagues, il étend la serviette prise à son hôtel, va tout de suite à l’eau. Son maillot de bain était si vieux, dans sa valise, qu’au moment de le mettre l’élastique a lâché, effrité comme du parchemin ; il a dû s’équiper de neuf aux Galeries locales. L’eau est glacée, il lui prend une envie de piailler ; il sautille ; chaque bond sabre ses chevilles. De gros rouleaux s’effondrent à un mètre de lui ; faisant plier l’horizon, l’entraînant à ras de sable en tirant après eux de longs fils de ciel clair ; reprenant force, se relevant sans cesse. Il avance avec précaution, guette ce moment de la vague, très bref, où le soleil se laisse prendre : juste sous la crête avant qu’elle ne s’incline ; une transparence turquoise, fugace, précieuse, tout de suite emportée. Il a de l’eau jusqu’aux genoux, le courant tire d’un côté, de l’autre ; la mer à cet endroit est blanche avec des taches vertes, rapides. Quelques nageurs se glissent entre deux vagues et resurgissent plus loin, de l’autre côté du bouillon, avec aisance et des fous rires. D’un coup l’univers rompt ses bases, la plage se jette sur lui, le ciel s’enroule, une peau craque, une mue qu’on retourne comme un gant, c’est l’espace qui a cédé par le milieu et libère un suc cannibale ; on le goûte, on tente une ingestion, enfin on le vomit par le ressac. Le sable des grandes profondeurs a laissé une longue trace rouge sur son ventre, ça remue un peu trop par ici. Il rit tout seul, en hoquetant, dans ses sinus s’est établie une colonie d’oursins, il tousse et crache, avise une sorte de grande flaque où il pourra, discrètement, se débarrasser du sable venu alourdir sa culotte.

Le soleil s’est arrêté ici, sur cette surface lisse ; l’eau est tiède, calme et profonde. Il plie et déplie ses orteils, très blancs sous l’eau claire ; détachés de ses pieds, zigzaguant à côté des mollets, cuisses jaillies de l’estomac, plexus en surplomb sur des morceaux éparpillés. Il ferme les yeux, chauffe. La masse ronde de l’eau se balance, presse doucement son corps ; il tient tout seul, appuyé contre l’eau, dans le mouvement délicat de l’eau ; il fait partie de la plage, de la mer, et de tout ce qui dans la mer se balance. Comme il s’endort, dans le bourdonnement des vagues qui bousculent, plus loin, des baigneurs à cris de mouettes, quelque chose l’arrête sur le bord du sommeil ; comme un souvenir, un souci léger. Dans le rêve qui s’amorce, encore retenu au jour par le bleu de la mer, le jaune de la plage, le grand hôtel rouge, il voit le phare, sa ponctuation très nette, un cylindre si clair qu’il bat et vibre en plein jour : trois, quatre, cinq phares sur le ciel foudroyé. Les cris des



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