La Russie et la France: De Pierre le Grand à Lénine by Hélène Carrère D'Encausse

La Russie et la France: De Pierre le Grand à Lénine by Hélène Carrère D'Encausse

Auteur:Hélène Carrère D'Encausse [D'Encausse, Hélène Carrère]
La langue: fra
Format: epub
Tags: History, General
Éditeur: Fayard
Publié: 2019-11-19T23:00:00+00:00


Chapitre IX

La guerre de Crimée

Cette guerre, qui opposa pour la deuxième fois en un siècle, de manière effroyable, les armées russes et françaises, partit d’une querelle sur les Lieux saints. La France avait obtenu en 1840 la confirmation d’accords antérieurs, en premier celui qu’avaient conclu Francois Ier et Soliman le Magnifique, lui conférant un droit de protection sur les Lieux saints. La Russie, devenue grande puissance sous le règne de Catherine II, obtint à son tour une sorte de protectorat sur les orthodoxes de l’Empire ottoman et le traité de Kutchuk-Kaïnardji consacra son statut de protectrice des chrétiens. La France, intéressée en priorité au sort des catholiques, abandonna plus ou moins à la Russie les autres confessions ; la présence religieuse russe en Orient s’accrut ainsi au détriment de la France et de la Porte car l’Empire ottoman comptait entre onze à douze millions de sujets orthodoxes sur qui la Russie prétendait exercer une certaine souveraineté. Une querelle éclate au début de 1853, de peu d’importance apparemment. Elle eut pour cause l’accès à l’église de Bethléem dont la Russie était responsable. La Russie protesta contre « un empiétement sur les droits des orthodoxes », le ton monta et l’opinion publique russe s’excita. On avança l’idée d’un entretien entre les deux empereurs pour apaiser une querelle religieuse menaçant de tourner au conflit international. Malgré des échanges épistolaires, la question des Lieux saints ne sera pas réglée. Nicolas Ier s’exaspère de ce qu’il tient pour une violation des engagements pris par le sultan et exige réparation. Au début de février, il lui envoie un ambassadeur chargé de régler une fois pour toutes l’affaire des Lieux saints. Cet ambassadeur est le prince Alexandre Menchikov, arrière-petit-fils du favori de Pierre le Grand, qui a combattu les Turcs en 1828. Il est généralissime, ministre de la Marine et gouverneur général de Finlande, ses titres sont clairement destinés à impressionner les Turcs, comme l’est le déploiement de troupes russes à la frontière moldave au même moment. Le prince généralissime, qui est escorté d’une imposante suite militaire, s’est d’abord arrêté à Odessa où il passe les troupes en revue, puis à Sébastopol ; autant de signaux destinés à rappeler à l’interlocuteur ottoman la puissance russe et ses ambitions dans la région. Pendant un mois, les observateurs s’interrogent sur la mission de Menchikov ; ses propos sont en effet vagues. Mais le 19 avril, il adresse au ministre des Affaires étrangères de la Porte, Rifaat Pacha, une note fort arrogante où il reprend toutes les exigences qu’il lui avait présentées au cours de leurs précédents entretiens, la Russie veut qu’une convention diplomatique confirme le protectorat russe sur les chrétiens d’Orient et la Porte doit s’engager à le respecter. Le 5 mai, Menchikov présenta un ultimatum donnant cinq jours à la Porte pour signer un traité avec la Russie, sur la base des demandes formulées dans la note d’avril. Cinq jours plus tard, la réponse ottomane arrive. La Porte assure la Russie qu’elle est disposée à prendre toutes les



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