La peau des femmes by Max Obione

La peau des femmes by Max Obione

Auteur:Max Obione [Obione, Max]
La langue: eng
Format: epub
Éditeur: Ska Éditions
Publié: 2015-10-11T16:00:00+00:00


Ursula Meiergrantz arrêta sa lecture. Elle connaissait la liste de ces meurtres en série. L'assassinat de Madame Rosa Pitti fut sans doute le plus horrible des actes criminels de cet étrangleur, écorcheur et dévoreur. Elle ne voulut pas en lire davantage, souhaitant conserver en mémoire la musique de la prose d'Oskar. Durant plus d'un quart d'heure, elle demeura immobile à son bureau. Elle paraissait réfléchir à la conduite à tenir. Enfin, elle rassembla tous les cahiers et se leva.

Les molécules d'oxyallyséprine produisent leur effet retard durant un temps limité et précis. Il faut renouveler la médication à heure fixe de peur que, l'Axolpan étant rendu inactif, le trouble mental, se réveillant avec plus d'intensité, ne dégénère en bouffées délirantes ou en accès de violence irrépressibles. Depuis quelques heures, elle avait sciemment laissé passer le délai. Oskar dans sa cellule n'était plus abruti dans sa camisole chimique ; elle le savait. Elle l'avait voulu ainsi au titre de sa recherche clinique. Du moins était-ce cette raison que sa conscience affichait…

Ses pas la dirigèrent vers la cellule. La veilleuse du couloir diffusait une maigre lumière pisseuse. L'infirmière de nuit sommeillait à son poste. On avait enfin éteint la télé dans la salle commune. Les pensionnaires du pavillon, assommés par leurs doses, dormaient. D'ordinaire, des cris de cauchemar troublaient la quiétude du lieu ; cette nuit-là le calme régnait.

Quand elle pénétra dans la chambre de force aux murs capitonnés, le corps allongé sur le lit bougea dans l'obscurité. Elle n'alluma pas la lumière en refermant la porte derrière elle. À travers la fenêtre barreaudée, le lampadaire extérieur projetait des ombres bleues sur les parois de la pièce. Une boule d'angoisse stationnait dans la gorge du médecin chef. Elle dit d'une voix faussement détachée :

« Oskar, je vous rapporte vos cahiers. »

La forme sur le lit s'agita et se dressa lentement. Elle n'entendait pas la respiration du fou. Ursula Meiergrantz sentit monter en elle une onde de peur intime qui ne la poussait pas à fuir, au contraire. Elle retrouvait cette sensation d'avant son premier amant quand son désir d'homme submergeait son être. Ses mains devinrent moites, son ventre se contracta convulsivement, ses cuisses tremblèrent. Elle sentit une sueur chaude envahir le bas de son dos. Elle connaissait le danger, elle avait lu les cahiers, elle avait près d'elle cet écrivain que l'institution psychiatrique allait détruire à force d'électrochocs et de chimie. Elle n'était que sensations humides, troublée tant par le désir que par la transgression professionnelle.

« J'ai lu vos cahiers. » murmura-t-elle en frissonnant.

Elle souhaitait qu'il la caressât. Maintenant. Elle souhaitait qu'il la parcourût, qu'il jouît aussi de sa peau à elle, sur laquelle aucune main d'homme ne s'était posée depuis si longtemps, et aussi qu'il continue à écrire, un jour prochain, si bien. Sa peau à elle…

La main d'Oskar se posa sur sa jambe.



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