Auletris by Anaïs Nin

Auletris by Anaïs Nin

Auteur:Anaïs Nin
La langue: fra
Format: epub
Tags: Erotique
Éditeur: Finitude
Publié: 2018-10-03T22:00:00+00:00


* * *

1. En français dans le texte.

2. En français dans le texte.

La vie à Provincetown

Dans la rue principale, celle qui longe la Baie, les pêcheurs portugais discutent, assis en cercle comme des Italiens. Derrière la rangée de maisons qui bordent cette grand-rue, des pontons plus ou moins longs s’avancent dans la mer. Et sur ces pontons s’entassent les abris et les appentis en bois brut dans lesquels les pêcheurs entreposaient autrefois leurs filets, leur matériel et les barques à réparer. Leurs toits sont pointus et, avec leurs poutres apparentes, ils ressemblent à l’intérieur d’un vieux bateau. À marée haute l’eau roule sous les jetées, à marée basse celles-ci se dressent sur une grande plage de sable. C’est là que vivent les artistes.

Les murs de planches sont minces et on peut tout entendre. Le plus souvent, les stores devant les fenêtres ne sont pas baissés et on peut tout voir. Il n’y a pas de gardien, personne pour dire « Arrêtez ce vacarme ! », ni pour surveiller les allers et venues le soir. Ni concierge, ni propriétaire. Simplement les pontons solitaires et sombres lorsque la nuit tombe, le bruit des vagues et ces studios qui ressemblent encore à des hangars, occupés par des gens de tous horizons.

Provincetown est pleine de soldats, de marins, de magnifiques jeunes Portugaises… et de vacanciers en shorts. On y trouve aussi un cinéma, un bar réservé aux hommes, plusieurs night-clubs.

Dans un des studios sur les pontons vivait une jeune femme qui posait pour les artistes. Sa bouche était si grande, si pleine, si charnue qu’on ne voyait rien d’autre. Quand elle vous regardait, vous ne remarquiez que sa bouche, une vraie bouche de négresse. Elle se maquillait outrageusement, sur son teint trop blanc et trop poudré, ses lèvres grasses trop rouges ressortaient au point d’éclipser tout son visage et même son corps. Elle était modèle pour des peintres et, disait-on, plutôt connue au Village, à New York. Certains assuraient qu’elle avait une plastique magnifique, mais en réalité ils ne voyaient que sa bouche. Pour tout dire, ils ne pouvaient s’empêcher, à un moment ou un autre, d’imager que ses autres lèvres devaient être tout aussi généreuses et tout aussi exagérément pulpeuses. De la même façon que l’on soupçonne les lèvres pincées des puritaines de refléter leur sexualité étriquée. Du matin au soir, cette Bouche n’était vêtue que d’un maillot de bain d’un rouge éclatant.

Ses stores étaient toujours levés. Dès qu’elle était réveillée, on pouvait la voir en train de s’habiller, tout comme on avait pu la regarder dormir, tard dans la matinée, étalée dans ses draps en désordre. Ça, c’était quand elle était seule. Mais elle était rarement seule. Le plus souvent, quand elle était allongée, elle était complètement dissimulée par le corps d’un homme ou par son bras musclé… Ils dormaient comme s’ils avaient livré un combat, un combat épuisant, avant de s’effondrer au petit matin dans les bras l’un de l’autre. Emmêlés comme ils l’étaient, on avait peine à croire que cet enlacement puisse être temporaire.



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