La part de l'autre by Schmitt Eric-Emmanuel

La part de l'autre by Schmitt Eric-Emmanuel

Auteur:Schmitt,Eric-Emmanuel [Schmitt,Eric-Emmanuel]
La langue: fra
Format: epub, mobi
Tags: Roman
ISBN: 9782253155379
Éditeur: AlexandriZ
Publié: 2003-06-09T14:34:01+00:00


Le Dictateur Vierge

Je démissionne.

Vous êtes allés contre les vœux des militants en remettant le destin du parti ouvrier national-socialiste à un homme dont les idées sont incompatibles. Je ne saurais plus longtemps appartenir à un pareil mouvement. Mon départ est irrévocable.

ADOLF HITLER

***

Les hommes du comité se dévisagèrent avec lassitude.

— Ça y est : la prima donna a une nouvelle crise de nerfs.

— La diva Hitler nous épuise.

— Combien de fois a-t-il démissionné déjà ?

— Et puis tant pis, qu’il s’en aille ! Le Parti a existé sans lui. Il existera après lui.

Un silence dubitatif suivit cette remarque. Chacun essayait de se convaincre que cela pouvait être vrai. Quel autre tribun avaient-ils ? Qui saurait transformer la moindre réunion publique en spectacle de cirque exaltant ? Qui pourrait déclencher des acclamations sans fin ? Qui provoquerait spontanément des adhésions ? Qui débloquerait les fonds ? Qui allait-on afficher pour appâter le public ?

— Je sais ce que vous pensez mais n’exagérez pas son importance. Hitler n’était qu’un tambour.

— Oui, mais quel tambour ! Nous n’en avons pas de meilleur.

— On ne va pourtant pas donner la direction Parti à un tambour.

— Je vous signale que nous l’avons déjà fait. Nous la lui avons proposée deux fois.

— Et, chaque fois, il l’a refusée.

— Pourquoi ?

— Pourquoi quoi ? Pourquoi la lui avons-nous proposée ? Ou pourquoi l’a-t-il refusée ?

De nouveau, le silence s’installa. Hitler avait décliné la direction du Parti sous prétexte qu’il n’avait aucun don pour l’organisation. Le comité avait trouvé cette attitude honnête. Il se demandait maintenant si Hitler n’avait pas agi ainsi pour obtenir davantage.

— Il est fou. Se rend-il compte de ce qu’il risque si nous acceptons sa démission ?

— Mais nous l’acceptons.

— Taisez-vous ! Il va se retrouver seul et être obligé de fonder un nouveau parti.

— Et alors ? C’est son problème.

— Comme d’habitude, il joue le tout ou rien. Pas de compromis.

— Nous non plus, nous ne ferons pas de compromis. Qu’il parte. Bon débarras. Adieu.

— Certes, mais imaginez qu’il crée son mouvement. Il va réussir. La majorité de nos militants vont le suivre. Surtout s’il joue les martyrs, ce qu’il joue très bien…

— Et alors ! Qu’est-ce que vous proposez ? On ne va quand même pas se coucher devant lui !

Quelques jours plus tard, le 29 juillet 1921, Hitler devenait le chef unique du parti national-socialiste.

Il regardait la foule qui l’acclamait, debout, il s’offrait tout entier à ses cris, à son hystérie, à ses caresses. Il songeait au chemin parcouru en trois ans, depuis son statut de propagandiste dans l’armée jusqu’à celui de tribun politique, depuis ce groupuscule qui se réunissait dans les arrière-salles lugubres des cafés, sans cartes, ni tampons, ni imprimés, ni affiches, ce groupuscule au fonctionnement démocratique comportait alors autant de membres du comité que de militants, jusqu’à cette foule qui le plébiscitait, lui reconnaissait la stature de chef, encadrée par un service d’ordre aussi musclé qu’armé, et qui portait haut ses bannières. Hitler était particulièrement fier de l’insigne nazi,



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