La Déconnomie (French Edition) by Jacques Généreux

La Déconnomie (French Edition) by Jacques Généreux

Auteur:Jacques Généreux [Généreux, Jacques]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Le Seuil
Publié: 2016-11-24T23:00:00+00:00


La « révolution keynésienne »

Dans l’économie réelle, explique Keynes, aucun investisseur ne peut rigoureusement calculer le taux de rendement probable d’un investissement sur un horizon de dix à vingt ans. Il ne s’agit donc pas pour lui de prendre un risque calculé, mais d’affronter une incertitude fondamentale20, car il ne sait tout simplement pas de quoi l’avenir sera fait. Keynes rejette aussi le postulat néoclassique selon lequel, grâce aux mécanismes d’ajustement automatique des prix, les agents seraient immunisés contre des déséquilibres économiques durables. Aucun entrepreneur ne peut avoir une foi aveugle dans l’avenir radieux de l’économie, aucun salarié n’est assuré que le plein-emploi régnera toujours, et tout le monde sait que les crises déclenchent des récessions assez dures et assez longues pour mettre des millions de travailleurs au chômage et des milliers d’entreprises en faillite. L’avenir est fondamentalement incertain.

Dès lors, pour les keynésiens, les choix des agents sont fortement influencés par leur degré de confiance dans l’avenir et par la manière plus ou moins optimiste ou pessimiste dont ils anticipent l’état de la demande. Les entreprises déterminent leur production et leurs investissements en fonction de leurs anticipations sur la demande de biens et services21. Les travailleurs choisissent leur niveau de consommation et d’épargne en fonction des salaires qu’ils espèrent percevoir, et cette espérance dépend elle-même d’une anticipation sur la demande de travail des entreprises. Le circuit de l’économie nationale est donc exactement inverse à celui que supposent les néoclassiques. C’est la demande de biens qui crée l’offre, laquelle crée à son tour l’emploi. Les prévisions sur la demande (D) de biens déterminent le volume de production, et c’est ce dernier qui fixe le volume de travail nécessaire pour assurer la production que les entreprises croient être en mesure d’écouler. Il n’y a aucune raison a priori pour que ce volume de travail nécessaire soit suffisant pour assurer un emploi à tous les demandeurs d’emploi. Il peut donc y avoir du chômage, même si les entreprises n’ont pas de difficulté à écouler leurs produits. Et il y en aura bien davantage si l’économie subit une récession et si des anticipations pessimistes incitent tous les agents à réduire leurs dépenses.

Une fois que les anticipations se sont ainsi retournées, les prétendus mécanismes néoclassiques de retour à l’équilibre sont parfaitement illusoires. On aura beau baisser les salaires et les taux d’intérêt, on constatera que l’épargne, l’investissement et l’emploi ne s’ajustent pas comme prévu par les néoclassiques. Si les ménages craignent de perdre leur emploi, la baisse des taux d’intérêt ne les dissuadera pas d’épargner autant que possible, plutôt que de dépenser. Tant que les entreprises anticipent une stagnation ou une récession de l’activité, la baisse des taux ne les persuadera pas d’investir. Si les travailleurs et le gouvernement ne peuvent empêcher la baisse des salaires, celle-ci ne fera qu’aggraver le recul de la demande globale et le pessimisme des entreprises.

Dans un tel contexte, si l’État n’intervient pas pour soutenir la demande et restaurer la confiance dans l’avenir, la récession ne peut que s’approfondir. Or



Télécharger



Déni de responsabilité:
Ce site ne stocke aucun fichier sur son serveur. Nous ne faisons qu'indexer et lier au contenu fourni par d'autres sites. Veuillez contacter les fournisseurs de contenu pour supprimer le contenu des droits d'auteur, le cas échéant, et nous envoyer un courrier électronique. Nous supprimerons immédiatement les liens ou contenus pertinents.