Je viens d'un pays qui n'existe plus by Adriana Karembeu

Je viens d'un pays qui n'existe plus by Adriana Karembeu

Auteur:Adriana Karembeu [Karembeu, Adriana]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Seuil
Publié: 2014-09-16T22:00:00+00:00


Loin des clivages et des tensions d’hier entre Kanaks séparatistes et Caldoches « loyalistes » – on me glisse que le mot « Caldoche » est mal vu et fait très « métropolitain » –, son titre de champion du monde « pour la France » vaut bien toutes les Marseillaise ; en outre, la Légion d’honneur épinglée au revers de son veston par le président Chirac le fait passer, non sans cérémonie, du ruban rouge élyséen au tapis rouge de l’hôtel du « gouverneur ». Ironie de l’Histoire, celui-ci est installé, comme par malice, rue des Artifices, à Nouméa, quartier de l’Artillerie !

J’étais donc pressée d’échapper au protocole, passage obligé en la circonstance, pour gagner au plus vite la réception traditionnelle, forcément moins guindée, préparée affectueusement par les siens pour nous accueillir en jeunes mariés.

Nous passons rapidement en voiture devant le lycée où il a suivi sa scolarité, dans le quartier de la Vallée des Colons. Entre les devoirs de français, sa matière de prédilection, la cour d’école l’a vu dribbler tous les copains balle au pied… Enfin, nous voici installés, moi côté hublot, dans le petit avion d’Air Calédonie qui nous déposera à Wanaham, l’aéro-club de Wé, sur Lifou.

J’avais longuement scruté la carte qui permet d’embrasser d’un regard les îles du Sud Pacifique. À ma grande surprise, et en balayant l’océan du regard à 180 degrés, j’avais remarqué que Santiago du Chili semblait se trouver sur la même latitude qu’Auckland, en Nouvelle-Zélande, et Sydney, en Australie…

Je m’en amusai : « A small world, after all ! »

Je m’amusais aussi, crayon en main, à calculer les distances séparant la Polynésie et les Marquises de toute la Mélanésie… J’adore parcourir les planisphères, comme je le faisais, naguère, à l’Université Charles de Prague. Je suis toujours, d’ailleurs, une grande adepte des cartes routières ou marines qui permettent d’imaginer de grandes évasions, de beaux voyages…

Cette fois, j’entrais dans une sorte de « micro-zoning » aérien survolant d’abord l’anse des Citrons ou celle de Vata – Christian lui-même hésitait à les identifier – à la sortie de Nouméa, le temps d’admirer à basse altitude quelques piroguiers en action, puis de voir s’éloigner des plaines mangées par la mangrove le long des estuaires. Au-delà des baies sablonneuses, passes et îlots, les réserves marines échelonnées contre la Grande Terre font une tache plus sombre, d’un bleu profond, dans l’eau turquoise.

La plus grande surprise restait à venir en se posant à Wé : devoir dialoguer en drehu, la langue locale, l’un des trente dialectes de l’archipel ! Je me réjouissais à peine de mes rapides progrès en français, et soudainement j’étais projetée vers une nouvelle découverte linguistique… Cet examen de passage n’était qu’un jeu, bien sûr. Par défi, je me contenterai de répondre à quelques exercices de prononciation, comme les salutations élémentaires : bozu pour bonjour et ba-baille pour au revoir. J’appris aussi par la même occasion que les visiteurs non avertis qui font répéter les mots et tendent l’oreille pour les comprendre sont aussitôt qualifiés de « zoreilles » par leurs hôtes un rien moqueurs.



Télécharger



Déni de responsabilité:
Ce site ne stocke aucun fichier sur son serveur. Nous ne faisons qu'indexer et lier au contenu fourni par d'autres sites. Veuillez contacter les fournisseurs de contenu pour supprimer le contenu des droits d'auteur, le cas échéant, et nous envoyer un courrier électronique. Nous supprimerons immédiatement les liens ou contenus pertinents.