Illusions perdues by Honoré de Balzac

Illusions perdues by Honoré de Balzac

Auteur:Honoré de Balzac [Balzac, Honoré de]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Roman, Fiction
Éditeur: Feedbooks
Publié: 1843-10-18T23:00:00+00:00


Lucien laissa Coralie et Camusot pour aller aux Galeries-de-Bois. Quel changement son initiation aux mystères du journal avait produit dans son esprit ! Il se mêla sans peur à la foule qui ondoyait dans les Galeries, il eut l'air impertinent parce qu'il avait une maîtresse, il entra chez Dauriat d'un air dégagé parce qu'il était journaliste. Il y trouva grande société, il y donna la main à Blondet, à Nathan, à Finot, à toute la littérature avec laquelle il avait fraternisé depuis une semaine ; il se crut un personnage, et se flatta de surpasser ses camarades ; la petite pointe de vin qui l'animait le servit à merveille, il fut spirituel, et montra qu'il savait hurler avec les loups. Néanmoins, Lucien ne recueillit pas les approbations tacites, muettes ou parlées sur lesquelles il comptait, il aperçut un premier mouvement de jalousie parmi ce monde, moins inquiet que curieux peut-être de savoir quelle place prendrait une supériorité nouvelle et ce qu'elle avalerait dans le partage général des produits de la Presse. Finot, qui trouvait en Lucien une mine à exploiter, Lousteau qui croyait avoir des droits sur lui furent les seuls que le poète vit souriants[Dans le Furne : " souriant ", coquille typographique.] . Lousteau qui avait déjà pris les allures d'un rédacteur en chef, frappa vivement aux carreaux du cabinet de Dauriat.

— Dans un moment, mon ami, lui répondit le libraire en levant la tête au-dessus des rideaux verts et en le reconnaissant.

Le moment dura une heure, après laquelle Lucien et son ami entrèrent dans le sanctuaire.

— Eh ! bien, avez-vous pensé à l'affaire de notre ami ? dit le nouveau rédacteur en chef.

— Certes, dit Dauriat en se penchant sultanesquement dans son fauteuil. J'ai parcouru le recueil, je l'ai fait lire à un homme de goût, à un bon juge, car je n'ai pas la prétention de m'y connaître. Moi, mon ami, j'achète la gloire tout faite comme cet Anglais achetait l'amour. Vous êtes aussi grand poète que vous êtes joli garçon, mon petit, dit Dauriat. Foi d'honnête homme, je ne dis pas de libraire, remarquez ? vos sonnets sont magnifiques, on n'y sent pas le travail, ce qui est rare quand on a l'inspiration et de la verve. Enfin, vous savez rimer, une des qualités de la nouvelle école. Vos Marguerites sont un beau livre, mais ce n'est pas une affaire, et je ne peux m'occuper que de vastes entreprises. Par conscience, je ne veux pas prendre vos sonnets, il me serait impossible de les pousser, il n'y a pas assez à gagner pour faire les dépenses d'un succès. D'ailleurs vous ne continuerez pas la poésie, votre livre est un livre isolé. Vous êtes jeune, jeune homme ! vous m'apportez l'éternel recueil des premiers vers que font au sortir du collége tous les gens de lettres, auquel ils tiennent tout d'abord et dont ils se moquent plus tard. Lousteau, votre ami, doit avoir un poème caché dans ses vieilles chaussettes. N'as-tu pas un poème, Lousteau ? dit Dauriat en jetant sur Étienne un fin regard de compère.



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