Histoire de France (Vol 08) 1466-1483 by Histoire de France - Jules Michelet

Histoire de France (Vol 08) 1466-1483 by Histoire de France - Jules Michelet

Auteur:Histoire de France - Jules Michelet [Michelet, Histoire de France - Jules]
La langue: fra
Format: epub
Publié: 2014-03-25T23:00:00+00:00


CHAPITRE II

NANCY—MORT DE CHARLES LE TÉMÉRAIRE

1476-1477

Le duc courut douze lieues jusqu'à Morgues, sans dire un mot; puis il passa à Gex, où le maître d'hôtel du duc de Savoie l'hébergea et le refit un peu. La duchesse vint, comme à Lausanne, avec ses enfants et lui donna de bonnes paroles. Lui, farouche et défiant, il lui demanda si elle voulait le suivre en Franche-Comté. Il n'y avait à cela nul prétexte. Les Savoyards, avant la bataille, avaient repris leurs places dans le pays de Vaud et pouvaient les défendre, leur armée étant restée entière. La duchesse refusa doucement; puis le soir, étant partie de Gex avec ses enfants, Ollivier de la Marche l'enlève aux portes. Un seul des enfants échappa, le seul qu'il importât de prendre: le petit duc... Ce guet-apens, aussi odieux qu'inutile, fut un malheur de plus pour celui qui l'avait tenté[339].

Il réunit à Salins les états de Franche-Comté. Il parla fièrement, avec son courage indomptable, de ses ressources et de ses projets, du futur royaume de Bourgogne. Il allait former une armée de quarante mille hommes, taxer ses sujets au quart de leur avoir... Les états en frémirent, ils lui représentèrent que le pays était ruiné; tout ce qu'ils pouvaient lui offrir, c'étaient trois mille hommes et seulement pour garder le pays.

«Eh bien! s'écria le duc, il vous faudra bientôt donner à l'ennemi plus que vous ne refusez à votre prince. Je m'en irai en Flandre, j'y résiderais toujours. J'ai là des sujets plus fidèles.»

Ce qu'il disait aux Comtois, il le disait aux Bourguignons, aux Flamands, et n'obtenait pas davantage. Les états de Dijon ne craignirent pas de déclarer que c'était une guerre inutile, qu'il ne fallait pas fouler le peuple pour une querelle mal fondée, sans espoir de succès[340]. La Flandre fut plus dure. Elle répondit (selon la lettre du devoir féodal, mais la lettre était une insulte) que s'il était environné des Suisses et Allemands, sans avoir assez d'hommes pour se dégager, il n'avait qu'à le leur faire dire, les Flamands iraient le chercher.

Quand ce mot lui parvint, il eut un accès de fureur. Il dit que ces rebelles le payeraient cher, que bientôt il irait jeter bas leurs murs et leurs portes. Puis il sentit qu'il était seul, et il tomba dans un grand abattement. Rejeté des Flamands aux Français, des Français aux Flamands, que lui restait-il[341]?... Quel était maintenant son peuple, son pays de confiance?... La Comté même envoya sous main au roi de France pour traiter de la paix[342]. La Flandre lui refusa sa fille! Après Granson, il avait écrit qu'on lui envoyât mademoiselle de Bourgogne, mais les Flamands ne jugèrent pas à propos de se dessaisir de l'héritière de Flandre. Après tout, s'il l'eût eue, où l'eût-il déposée?

Ses sujets néanmoins n'avaient pas tout le tort. Indépendamment de ce dur gouvernement qui les avait surmenés, excédés, pour d'autres causes encore, plus générales et plus durables, ils déclinaient, la vie baissait chez eux, leurs ressources n'étaient plus les mêmes. Le jeune empire de la maison de Bourgogne se trouvait déjà vieux sous son pompeux habit[343].



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