Fiction 278 by collectif

Fiction 278 by collectif

Auteur:collectif [collectif]
La langue: fra
Format: epub
Publié: 2016-11-05T09:34:10+00:00


Ce fut un repas horrible ; la nourriture fut acceptable (la viande, pourtant aurait pu être un peu plus tendre) mais dès le début l’atmosphère fut extrêmement tendue. Belinda, resplendissante dans la robe jaune dont j’ai déjà parlé, ses cheveux, tels une torche, éclairant la salle à manger, absorbait de ses yeux clairs tout ce qui se passait et ne disait pas grand chose. Elle essaya bien, mais sans succès, de briser cette atmosphère. Mes tantes rivalisaient de méchanceté, à croire qu’en revenant de l’église, une guêpe leur avait donné des leçons ! En outre, elles avaient eu plus de culot que je ne croyais : elles avaient invité le Révérend A.B. Potter à partager notre repas, et son benedicite qui n’en finissait plus – exactement trois minutes et demie à ma montre Ingersoll – aurait suffi à décourager le plus enthousiaste des convives. Mon oncle essaya désespérément de garder la face malgré les attaques fielleuses de mes tantes ; mais elles lançaient leurs flèches, l’une après l’autre, sans jamais s’arrêter. Elles demandèrent à Belinda pourquoi elle avait choisi un petit trou comme notre ville pour venir y exercer ses grands talents ; elles la harcelèrent sur ses convictions religieuses – là, Belinda répondit qu’elle allait rarement à l’église, qu’en général ça l’ennuyait et qu’elle trouvait Dieu bien plus vivant en dehors des églises que dedans. Sur ce, le Révérend Potter dit qu’il passerait chez elle et lui apporterait quelques documents sur son église ; elle lui sourit gentiment et lui conseilla de ne pas se déranger pour si peu. Le duel continua longtemps, un bien pauvre duel ; et dehors, tout était si ensoleillé, si plein de vie ; ici, à l’intérieur de la maison, tout n’était qu’étroitesse d’esprit et malveillance. Et puis j’étais triste, triste parce qu’à partir du dimanche suivant, je ne verrai sans doute plus mon oncle. La seule question à laquelle je ne parvenais pas à trouver de réponse : en si peu de temps, pourrait-il convaincre Belinda de l’accompagner dans son voyage vers les étoiles ? Toutes mes réflexions, je les dissimulai soigneusement derrière la serviette de table qui était glissée dans le col de ma chemise du dimanche.

Après le repas, quand la dernière bouchée de gâteau au caramel fut avalée (chacune de mes tantes en avait engouffré trois morceaux), nous jouâmes à Flinch, ce qui n’arrangea guère l’humeur de mes tantes, car Belinda gagna quatre fois de suite. Mon oncle proposa alors que nous allions tous chez Lemon’s. Et nous nous entassâmes tous dans la voiture de mon oncle, enveloppés par les regards haineux de mes tantes et par la gêne qui gagnait le Révérend Potter – même son crâne chauve avait l’air mal à l’aise. Chez Lemon’s, mes tantes attaquèrent aussitôt, avec passion, les coupes glacées, elles demandèrent même un supplément de cacahuètes grillées et autour d’elles, la conversation mourrait ; ce n’était déjà plus que quelques pauvres spasmes, étouffés par la haine des deux femmes. Plus tard, quand mon oncle nous



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