Être brigand by Garnot

Être brigand by Garnot

Auteur:Garnot
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Armand Colin
Publié: 2013-05-14T16:00:00+00:00


La répartition du travail

Toutes les techniques de vols en bande impliquaient une hiérarchisation, en fonction des compétences, et une division des tâches, qui assignaient à certains voleurs des rôles de surveillance, de sécurisation ou de logistique lorsque le butin était encombrant, à d’autres la réalisation de l’acte lui-même ; cette prise en charge collective des rapines modelait une sociabilité délinquante, qui s’organisait autour du partage des risques et des gains. Dans la pègre cartouchienne, onze techniques distinctes (pas forcément exclusives les unes des autres) étaient employées, correspondant chacune à des stades différents de compétence. Au niveau inférieur, les « rôdeurs de nuit », très polyvalents, s’adonnaient au vol avec agression, à l’effraction violente, au vol à l’escalade et au vol sur véhicule, et, occasionnellement, à l’anquillage dans des cabarets ; plus subtils et agissant de jour, des délinquants alliant bagou et habileté manuelle pratiquaient des effractions d’appartements avec de fausses clefs, des anquillages dans des boutiques de luxe et des vols à la visite, toutes techniques nécessitant ruse et finesse ; enfin, les picpockets occupaient le sommet de la hiérarchie des brigands, ne pratiquant que le vol de poche, art très difficile qui nécessitait un véritable apprentissage (les transformations des habitudes vestimentaires, bien antérieures à la Régence, avec l’adoption des poches dans les vêtements, avaient entraîné le remplacement des coupeurs de bourse par les pickpockets). Au vol de mouchoirs, simple et presque à la portée de tous, se juxtaposaient ainsi des techniques plus complexes, dont la pratique désignait, à coup sûr, un spécialiste : subtiliser une montre ou une bourse au fond d’une poche supposait des gestes adroits, rapides et précis, bref, des tours de main, sans parler de certaines techniques encore plus subtiles, qui faisaient appel à des diversions psychologiques réclamant de grandes compétences (aborder la victime et la distraire en lui tenant un discours débité sur le ton de la confidence, qui justifiait un rapprochement corporel, ou, plus souvent encore, vols organisés et collectifs, où la victime était distraite par des complices, tandis que d’autres se passaient prestement le montant du vol).

On retrouvait une telle division du travail dans la plupart des bandes importantes, quelle que fût l’époque. Chez les Coquillards dijonnais, à la fin du Moyen ge, elle engendrait la fierté des brigands parvenus à une certaine maîtrise, un petit nombre d’entre eux se distinguant comme « les fins de la Coquille », l’élite du crime en quelque sorte : c’étaient les plus habiles, les « princes des gayeuls », qui dominaient « les coquarts ou apprentis », petits délinquants qu’on nommait encore les « gascâtres » ; ils se répartissaient aussi selon leurs activités, entre voleurs, tricheurs, faux-monnayeurs et meurtriers, avec en leur sein ce qu’on pourrait appeler des spécialités, qui allaient des coupeurs de bourses aux cambrioleurs, en passant par ceux qui couchaient dans les auberges afin de dépouiller les marchands qui partageaient leur chambrée, et par ceux qui avaient pour charge de remettre le butin aux receleurs. Quelques siècles plus tard, à la



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