En descendant la rivière by Edward Abbey

En descendant la rivière by Edward Abbey

Auteur:Edward Abbey [Abbey, Edward]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Récits
ISBN: 9782351782415
Éditeur: Éditions Gallmeister
Publié: 2020-04-01T22:00:00+00:00


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MA RÉPONSE À RENÉ DUBOS

DANS SON RÉCENT ouvrage, Courtisons la terre, René Dubos1 décrit avec fierté la transformation du paysage européen, au fil du dernier millénaire, par le labeur humain, les besoins humains, la pensée humaine. J’éprouve de la compréhension et de la sympathie – de l’empathie, même – pour la vénération qu’il ressent à l’égard des scènes pastorales de son enfance. Moi aussi, je suis né et j’ai grandi dans une ferme, même si c’était en Pennsylvanie et non en France, et mes émotions les plus profondes – ces émotions tellement profondes qu’elles se rapprochent plus de la musique que des mots – furent formées, d’une manière ou d’une autre, par un contact intime durant l’enfance avec les bois sur la colline, le ruisseau qui coulait au milieu du pré, les poutres de chêne de la vieille grange, le puits, la petite hutte glacière construite sur le ruisseau, les érables à sucre, les champs de foin, et même ces champs cultivés dans lesquels mon père, mes frères et moi plantions du maïs en avril et que nous sarclions (non sans quelque contrainte) pendant l’été, puis nous coupions les épis, les effeuillions et les chargions, un par un et panier par panier, dans une charrette tractée par un attelage de chevaux, au cours de ce mois hanté et définitif qu’était le mois d’octobre.

Qui peut nier la beauté ainsi que l’utilité des champs bien entretenus, des prairies bien broutées, des granges, des fermes, des murs de pierre, des petits barrages, des moulins à eau, des pistes de terre sinueuses bordées de peupliers, de toutes ces choses construites avec soin par la main de l’homme, ces choses nourries et cultivées par l’amour de l’homme afin qu’elles portent fruit ? Qui peut nier cela ? Cela fait deux mille ans, depuis l’époque de Virgile et d’Horace, que les poètes s’affairent à louer les paysages bucoliques. Cependant que dix mille peintres, de Watteau à Inness en passant par Constable, représentaient en couleurs lumineuses la paix et l’abondance, telles qu’ils les percevaient, de la vie agraire. C’est un des grands piliers de l’industrie de la carte postale. Les hommes politiques américains, de Thomas Jefferson à Franklin Roosevelt et à Ronald Reagan (pour les citer par ordre décroissant), ont dit de la ferme familiale qu’elle était la colonne vertébrale de notre nation. Jefferson allait jusqu’à le penser quand il le disait.

Aujourd’hui, les défenseurs les plus fervents de l’agriculture traditionnelle sont les conservationnistes. Les vrais conservateurs. Il me suffira de citer le nom de deux d’entre eux : Aldo Leopold, dont l’expression “l’éthique de la terre” fait aujourd’hui partie du vocabulaire courant de la philosophie conservationniste ; et Wendell Berry, lui-même fermier, poète et écrivain, dont les essais audacieux et brillants recueillis dans des ouvrages tels que The Long-Legged House et The Unsettling of America2 constituent les meilleurs plaidoyers qui soient pour la préservation de la ferme familiale et du fermier indépendant, pour le réseau de valeurs économiques, politiques, spirituelles et esthétiques – le travail de la terre vu comme un mode de vie – qui reste à découvrir dans l’art antique de l’agriculture.



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