Confession d'un masque by Mishima Yukio

Confession d'un masque by Mishima Yukio

Auteur:Mishima, Yukio [Mishima, Yukio]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Roman, Gay & Lesbian, Fiotte, Merde de pédalo
Éditeur: Folio
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00


Je me rappelais l'étrange impression que m'avait faite ce mot « destinée » peu de temps auparavant. Après la cérémonie de la remise des diplômes au collège, j'avais été en automobile avec le vieil amiral directeur faire une visite officielle de remerciements au Palais. Au cours du trajet, ce vieil homme morose, qui avait du mucus collé au coin des yeux, critiqua ma décision de ne pas m'engager comme cadet, mais d'attendre tout simplement d'être appelé comme simple soldat. Il m'affirmait avec force que ma santé ne me permettrait pas de supporter les rigueurs de la vie du troupier.

« Mais j'y suis décidé.

- Vous dites cela parce que vous ne vous rendez pas compte de ce que cela implique. D'ailleurs, la date des engagements est déjà passée. Alors on n'y peut plus rien maintenant. C'est votre destinée. »

Il avait employé le mot en anglais, en le prononçant mal, à la façon d'autrefois.

« Comment ? lui demandai-je.

- La destinée. C'est votre destinée. »

Il répétait cela sur un ton monotone, de cette voix indifférente, timide, caractéristique des vieillards qui craignent d'être pris pour des grands-mères tatillonnes.

Au cours de mes précédentes visites à Kusano, j'avais sans doute déjà vu cette sœur qui jouait du piano. Mais la famille de Kusano était très collet monté, pas du tout à la bonne franquette, comme celle de Nukada, et quand l'un des amis de Kusano venait le voir, les trois sœurs disparaissaient aussitôt, ne laissant derrière elles que leurs sourires timides.

A mesure que se rapprochait la date de l'incorporation de Kusano nous nous rendions visite de plus en plus souvent et nous nous séparions à regret. Depuis que j'avais entendu ce piano, je ne pouvais m'empêcher d'avoir à l'égard de sa sœur une attitude extrêmement raide et gauche. En l'écoutant jouer, il m'avait semblé surprendre quelque secret lui appartenant et depuis lors, j'étais pour ainsi dire incapable de la regarder en face ou de lui parler. Quand il lui arrivait d'apporter le thé, je gardais les yeux baissés, sans rien voir que ses jambes et ses pieds agiles circulant avec légèreté sur le parquet. J'étais complètement transporté par la beauté de ses jambes, peut-être parce que je n'étais pas encore habitué à voir des citadines porter des pantalons bouffants comme ceux des fermières, ou bien des « slacks », devenus à la mode en ces temps dangereux.

Pourtant ce serait de ma part une erreur si je donnais l'impression que ses jambes éveillaient en moi une excitation sexuelle. Comme je l'ai déjà dit, je n'éprouvais aucune sorte de désir sensuel pour l'autre sexe. La meilleure preuve, c'est que je n'avais jamais eu la moindre envie de voir le corps nu d'une femme. Malgré cela, il m'arrivait de m'imaginer sérieusement que j'étais amoureux d'une jeune fille, puis la fatigue pernicieuse dont j'ai parlé commençait à m'engourdir l'esprit ; dès lors, je prenais un vif plaisir à me considérer comme un être gouverné par la raison et je satisfaisais mon désir vaniteux de faire figure d'adulte en assimilant mes



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