Cherchez la femme by Collectif

Cherchez la femme by Collectif

Auteur:Collectif
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Québec Amérique
Publié: 2013-04-24T00:00:00+00:00


Semaine 2

— C’est terrible, la ménopause. Moi, j’ai soixante-trois ans. Je suis supposée être ménopausée. Mais l’autre jour, je vais aux toilettes, pis là, je m’aperçois que j’ai le fond de culotte tout rouge. Le médecin m’a prescrit des médicaments, mais depuis ce temps-là, on dirait que j’oublie tout ! Si c’était pas de ma fille, ça serait pas si pire, mais elle appelle à tout bout de champ pour se plaindre de moi. Elle veut de l’argent pour ci, de l’argent pour ça, son chum la laisse, son chum y revient… C’est bien simple, à chaque fois que le téléphone sonne, j’ai le cœur qui me débat. J’ai peur que ça soit elle.

Agathe s’était convaincue que pour mieux profiter de son expérience au gym, elle devait s’y faire des amies. Mais à l’aube de cette deuxième semaine d’entraînement, coincée dans le vestiaire avec une Françoise en mal de confidences, cette idée lui semblait de plus en plus déraisonnable.

Surtout que Françoise n’était pas la seule à s’être réchauffée à l’idée de discuter avec Agathe. L’avant-veille, dans le coin étirements, Rose-Marie (madame Catalogue Sears) lui avait confié qu’elle « capotait sur les sacoches ». Agathe n’avait pas su si elle devait pousser un cri d’horreur ou laisser libre cours à son fou rire. Elle choisit d’opiner sobrement du bonnet, ce qui prédisposa Rose-Marie à pousser plus loin l’interaction. Agathe apprit ainsi que Rose-Marie était abonnée au catalogue Sears « pour les sacoches », qu’elle se commandait des sacoches sur Internet à raison de deux ou trois par semaine, mais qu’elle trouvait toujours les sacoches de ses amies plus belles que les siennes. Malheureusement pour Rose-Marie, son mari ne partageait pas son enthousiasme, alors elle devait cacher ses sacs à main partout dans la maison. Comme elle commençait à manquer de place, elle cachait parfois ses nouvelles sacoches dans ses vieilles. Et parlant de sacoches, où donc Agathe avait-elle acheté la sienne ? Parce qu’elle était vraiment spéciale…

Même si les désirs de sociabilité d’Agathe avaient été échaudés par les sacs à main de Rose-Marie, au moins, cette dernière s’épanchait sans attendre de réponse de son interlocutrice. Mais Françoise, elle, lorsqu’elle cessait enfin de parler, fixait Agathe comme si cette dernière allait faire des miracles.

— Pour les problèmes avec votre fille, avez-vous pensé à ne pas répondre au téléphone ? lui demanda Agathe.

— Vous êtes donc ben bonne, vous ! Françoise dévisageait Agathe, éblouie. L’assistante sociale m’a dit exactement la même chose !

Agathe poursuivit, plutôt flattée par sa perspicacité en matière de conseils à donner aux plus émotivement démunis :

— C’est plein de bon sens, quand on y pense. On n’est pas tenu au téléphone par une laisse, n’est-ce pas ? Quand il sonne, on a le choix de répondre ou non.

Françoise baissa les yeux.

— Je sais bien, mais je ne peux pas. J’ai essayé, mais quand je ne réponds pas, après, je ne fais plus rien.

— C’est-à-dire ?

— Je m’assois sur une chaise, pis je fixe le téléphone jusqu’à ce qu’il se remette à sonner.



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