Aux Pays du Soudan by Denis de Rivoyre

Aux Pays du Soudan by Denis de Rivoyre

Auteur:Denis de Rivoyre [Denis de Rivoyre]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Géographie, tourisme
Éditeur: Ligaran
Publié: 2014-09-03T16:00:00+00:00


Chapitre VII

Mender et Medina. – Les funérailles d’un choum. – Mes aventures dans le Debrè-Salè. – Mon départ de Keren. – Abba-Emnatou. – Le prix du sang.

LES FUNÉRAILLES D’UN CHOUM.

Trois quarts d’heure après, il n’y paraissait plus. À la place de cette trombe mugissante, à peine un mince filet d’eau gazouillant sur les cailloux ; et au matin, plus rien ; tout au plus des traces d’humidité. L’atmosphère était demeurée aussi étouffante ; et nous rôtissions en suivant péniblement le sentier qui serpentait au fond de ces gorges. En certains endroits, les parois verticales de la roche et les excavations creusées par les eaux le resserraient à tel point que le sabot de nos mules foulait à peine l’espace nécessaire pour se poser avec sécurité. Ce fut précisément à l’un de ces étranglements que nous nous trouvâmes tout à coup en face d’un groupe d’hommes qui venaient en sens contraire, et dont l’aspect semblait étrange. Au lieu de la lance et des armes traditionnelles dont tout Abyssin en voyage, riche ou pauvre, marchand ou soldat, n’aurait garde de se séparer, la plupart de ceux-là ne portaient à la main qu’un bâton, et sur le dos, que des instruments de musique : violes à long manche, tambourins rustiques, mandolines grossières, tels étaient les éléments de cet orchestre inopiné. Gœrguis connaissait celui qui paraissait être le chef. – Qui ne connaissait-il pas ? – Il s’avança vers lui, et, après l’échange de quelques mots, la bande escalada de son mieux les aspérités du roc sur notre flanc, et s’y tint en suspens, pour nous laisser le passage libre.

– Quels sont ces gens-là ? lui demandai-je, quand nous eûmes défilé.

– C’est une compagnie de chanteurs qui vont assister aux funérailles de Hakin.

– Et cet Hakin, qui était-ce ?

– Le choum du pays où nous sommes en ce moment, et l’un des plus importants parmi les notables des Bogos. Presque toutes les hautes terres relevaient de son autorité. Je ne suis point surpris. Il est mort de sa fille.

– Il est mort de sa fille ! que veux-tu dire par là ?

– C’est une histoire tragique, et qui ne date que d’hier. Hakin avait un fils, et une fille appelée Medina. Il y a deux ans, le premier périt dans un engagement avec les Barias. Medina était fiancée depuis longtemps à un jeune chef des Bogos de la plaine, et lorsqu’il se fut écoulé un temps suffisamment long après la mort de son frère, elle l’épousa. Il se nommait Mender. Tous les deux s’aimaient avec passion, et, loin de diminuer leur amour, comme il arrive trop fréquemment, le mariage ne fit que le stimuler davantage.

– Ah ! si je venais à te perdre, disait parfois en soupirant Mender à sa femme, je me couvrirais de cendres pour le reste de mes jours, et jamais une autre ne partagerait ma couche.

– Moi, répliquait Medina, si tu mourais, je ne te survivrais pas.

Ces propos-là, ils ne s’en cachaient point. À diverses reprises, on les avait entendus se les répéter l’un à l’autre.



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