02 La hauteur des terres by Julie Lemieux

02 La hauteur des terres by Julie Lemieux

Auteur:Julie Lemieux [Lemieux, Julie]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Roman
Éditeur: Éditions Hurtubise
Publié: 2017-02-27T05:00:00+00:00


Le soleil allait se coucher quand je me décidai à regagner le poste désaffecté. Plusieurs hommes étaient rentrés au chapitoine. En revanche, je n’avais toujours aucune nouvelle de Lucien ou de Portelance. Je tentai de saluer mes hôtes, seulement personne ne fit attention à moi. Je sortis dans la froide pénombre du jour mourant. Le nordet était enfin tombé. Seule face au lac, je songeai à la suite du voyage. Lucien m’avait prévenue que ce serait difficile. Je frissonnai. En empruntant le même sentier que la veille, je retrouvai sans peine le vieux poste. Rien n’avait bougé dans la pièce où nous avions dormi. Tremblante de froid, et de peur aussi, je me blottis sous la grande couverture.

Quelques minutes plus tard, j’entendis venir quelqu’un. Je me redressai vivement.

— Qui est là? demandai-je.

Lucien parut dans l’entrebâillement de la porte.

— Ce n’est que moi.

Il s’approcha.

— Tu trembles?

— Oui, j’ai froid.

Il retira sa ceinture à flèches, puis son capot de laine. Il me le tendit.

— Enlève ta cape et mets ça à la place.

Je lui obéis. Il rabattit le capuchon sur ma tête et m’enveloppa dans la grande couverture que Portelance avait rapportée la veille.

— As-tu mangé quelque chose?

— Non.

— Les Sauvages ne t’ont rien donné? fit-il, incrédule.

— Ils m’ont offert ce qui s’apparentait à un ragoût de lièvre, je crois. Ça sentait trop fort, je n’ai pas pu. J’ai seulement mangé un peu de leur pain en forme de galette33.

Lucien secoua la tête. Il sortit un morceau de pemmican d’un sac resté sur le sol à côté de sa ceinture et me le donna.

— Fais un effort. Tu dois manger. Ce n’est pas le temps de faire la difficile. Pas maintenant. Il n’y a plus aucun poste d’ici au lac Chamouchouane et il faudra bien que tu manges ce qu’il y a. Tiens, assieds-toi, je reviens.

Je m’efforçai de manger le pemmican qu’il m’avait proposé. Il revint quelques minutes plus tard avec une bassine d’eau tout en écorce.

— Elle est presque chaude. Tu pourras faire un brin de toilette pendant que je vais te chercher du thé.

Il noua sa ceinture sur sa chemise et me montra du doigt son sac à feu, resté par terre.

— Tu prendras ce qu’il te faut pour allumer la bougie. On n’y voit plus rien.

Il allait sortir, mais voyant que je ne bougeais pas, il se retourna. Son regard se fit interrogateur.

— Je ne sais pas faire du feu, lui avouai-je.

En silence, il revint vers moi et prit son sac. Il me demanda de tenir la bougie. Puis, avec l’aide d’un morceau d’amadou, d’une pierre à fusil et d’un batte-feu, il enflamma un morceau d’écorce de bouleau. Après y avoir allumé la bougie, il écrasa au sol l’écorce qui achevait de se consumer et sortit sans se retourner.

À mi-chemin entre mon père et mes amis, comme je me sentais loin de tous ceux qui m’aimaient! L’espoir de revoir mon père vivant m’avait donné le courage de me rendre jusqu’à cette pointe. Mais maintenant que je le savais sain et sauf, mes forces m’abandonnaient.



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