Une vie si convenable (Les 2 Terres, 28 janvier) by Rendell Ruth & Ruth Rendell

Une vie si convenable (Les 2 Terres, 28 janvier) by Rendell Ruth & Ruth Rendell

Auteur:Rendell, Ruth & Ruth Rendell [Hel Guedj, Johan-Frédérik]
La langue: fra
Format: epub
Tags: DET
Éditeur: Editions des Deux Terres
Publié: 2015-05-09T16:00:00+00:00


John paya l’aller simple pour Paddington et donna à Bertie assez d’argent pour s’acheter à manger dans le train. Ils avaient échangé un baiser passionné au cottage de Bury Row, avant de partir, mais John en aurait aimé un autre, cette étreinte d’adieu qui leur était interdite mais que n’importe quels amants « normaux » pouvaient se permettre. Le train entra en gare et Bertie monta dedans avec un « salut » laconique. Voyant des têtes pointer par les fenêtres et des mains levées faire des signes, John espérait apercevoir une dernière fois son amant, entrevoir un dernier signe de sa part. Mais il n’y en eut aucun et le convoi s’ébranla. Il le suivit du regard jusqu’à ce qu’il s’estompe au loin dans le néant, et la seule trace qui en subsistât fut le grand panache de fumée blanche s’élevant vers les nuages bas et noirs.

Il se retourna, bien conscient de revenir vers les soucis et le manque d’argent. D’ordinaire, Maud et lui étaient à l’aise, mais sa rémunération était incapable de supporter la charge d’un invité trop dépensier. Bertie avait chauffé sa chambre nuit et jour et, quand ils faisaient des courses, il avait dépensé l’argent de John en de coûteuses tranches de viande et des provisions de cigarettes apparemment sans fin. Le cottage puait la paraffine et le tabac. Tous les jours, on était allé chercher des pots de cidre et de bière et on sortait en boire encore d’autres au Red Cow. La première chose dont il se rendit compte en rentrant après avoir accompagné Bertie, ce fut l’odeur fétide de ces cigarettes et de ce poêle à huile.

– Je sais, furent les premiers mots de sa sœur. Et il fait trop froid pour laisser les fenêtres ouvertes.

– J’ai bien peur que vous ne vous soyez pas entendus, Bertie et toi.

– Non, on ne s’est pas entendus. À quoi sert de faire semblant ?

Elle garda le silence plusieurs minutes, assise devant sa machine à coudre, en maintenant l’ourlet à plat sous l’aiguille. Après avoir actionné un instant la pédale et fini de piquer sa couture, elle en retira ses deux mains et les posa sur ses genoux.

– Je n’ai rien dit, j’ai estimé que je ne pouvais pas, mais je sais ce que vous fabriquiez, Bertie et toi, dans la chambre d’appoint. C’était avec lui que tu avais fait ça, auparavant, hein ? C’est avec lui, je le sais. Tu avais dit que tu ne recommencerais jamais, John. Tu avais promis.

Il rougit, la face couleur brique.

– Je sais.

– Tu sais ce que je ressens ? C’était dans la manière qu’il avait de me regarder et de me parler, et d’absolument jamais remarquer mon bébé. (John fut horrifié de voir ses yeux s’emplir de larmes qui lui dégoulinèrent sur les joues.) J’avais l’impression qu’il voulait se débarrasser de moi, qu’il voulait que je m’en aille pour pouvoir être seul avec toi. C’est ça qu’il voulait.

– Ne pleure pas. S’il te plaît, non. Cela n’arrivera jamais. Jamais. Je sais que j’ai déjà rompu ma promesse, mais je ne la romprai plus.



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