Petit eloge du running by Coulon Cécile

Petit eloge du running by Coulon Cécile

Auteur:Coulon, Cécile [Coulon, Cécile]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Roman
ISBN: 1025203798
Éditeur: François Bourin
Publié: 2018-03-15T11:55:26+00:00


Chapitre 4

À mi-chemin du parcours

(le début de la fin)

Je vois la vie comme une grande course de relais

où chacun de nous avant de tomber doit

porter plus loin le défi d’être un homme.

Romain Gary, La Promesse de l’aube

On approche, on y est presque, le moment de la course où ça commence à « tirer ». Ce n’est pas que l’on se sente malade, fatigué, ou démoralisé, non, c’est juste une petite musique qui joue malheureusement de plus en plus fort, et qui irrigue les muscles. On arrive à ce moment du marathon où les vingt premiers kilomètres sont passés, plutôt tranquillement, et où tout se déroule comme prévu : les jambes sont un peu lourdes mais ça va, franchement, ça va. Pourtant la petite musique est là, avec sa question empoisonnée : « Est-ce que je vais pouvoir courir encore vingt et un kilomètres ? Il faut que je tienne sur la distance que je viens d’accomplir, est-ce que je vais y arriver ? » C’est sans doute à cet instant précis qu’on se sent le plus « couillon ». Parce qu’on vient d’infliger vingt bornes à notre organisme, c’est déjà quelque chose, et qu’on lui redemande, là, maintenant, de faire la même chose, alors même qu’il commence à tirer la langue.

C’est le moment de la course où les visages changent de couleur et d’expressions : on grimace, on s’arrose avec la fin de la petite bouteille d’eau qu’on nous a tendue au ravitaillement, on essaye de trouver des phrases motivantes pour continuer, mais ça y est, la petite musique n’est plus si petite. Tout d’un coup on se sent moins capable, on se sent même tout petit, faible. La fatigue est multipliée par l’idée qu’on n’arrivera sans doute pas à aller jusqu’au bout. Et encore, ce n’est que le début : dans dix kilomètres à peu près, il faudra passer le fameux mur. Le mur du marathon. Sauf que contrairement à celui de Game of Thrones, il n’existe pas ailleurs que dans notre tête. Les marcheurs blancs, eux, sont les coureurs qui nous dépassent sans broncher, ceux dont on se dit : « Mais comment font-ils, ces zombies, pour ne pas être fatigués ? » Révélation : ils sont fatigués, et ils se disent la même chose que ceux qui les dépassent. La fatigue qui apparaît à ce moment-là, la petite fatigue, qui n’a rien à voir avec le « mur » du prochain chapitre, des prochains dix kilomètres, est à la fois un signal d’alarme – ce moment où, dans sa tête, chaque coureur se demande s’il va avoir des ampoules, s’il lui reste de l’eau dans sa bouteille, si la banane qu’il a avalée au ravitaillement va passer ou pas –, et un objet de motivation improbable. Car c’est précisément pour cette fatigue que le coureur court.

Le coureur est un masochiste, un vrai. Un masochiste sponsorisé, souriant, un type qui s’explose les articulations, les tendons, en ayant envie, et besoin, de le faire. Qui n’a jamais entendu



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