Mortes-eaux: roman by Donna Leon

Mortes-eaux: roman by Donna Leon

Auteur:Donna Leon [Leon, Donna]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Roman policier
ISBN: 9782020593458
Éditeur: Calmann-Lévy
Publié: 2015-03-24T00:00:00+00:00


16

Brunetti, bien loin du farniente au bord de l’eau et des fraises plongées dans le mascarpone, se trouvait enfermé dans la questure, devant un bureau croulant sous les montagnes de papiers engendrées par les divers organes de l’État. Il s’était imaginé que, pendant l’absence de Patta et le retrait de Marotta, il lui reviendrait de prendre des décisions qui affecteraient la manière dont la justice serait rendue à Venise. Même s’il pouvait simplement veiller à affecter les plus incompétents à des affaires mineures, genre plainte d’un voisin à cause d’une télé trop bruyante, et libérer les meilleurs pour les faire travailler sur des délits ou crimes plus graves, au moins travaillerait-il pour le bien général. Mais il n’avait même pas assez de temps pour des tâches aussi élémentaires. En l’absence de ce qui devait être – il ne le comprenait que maintenant – le filtrage quotidien opéré par la signorina Elettra, la paperasse envahissait son bureau et occupait le plus clair de son temps. Le ministère de l’intérieur, semblait-il, était capable de produire des volumes entiers de règlements à un rythme quotidien, et de traiter de questions allant de la nécessité de trouver un interprète lorsqu’on interrogeait un suspect étranger, à la hauteur des talons convenables pour les femmes policières. Il parcourait tous ces papiers des yeux. Il aurait été inexact de dire qu’il les lisait, ce qui aurait impliqué un minimum de compréhension ; Brunetti passait dessus dans un état semi-comateux constitué d’un défilé sans fin de mots, puis tournait les pages sans avoir la moindre idée du sens de ce qui était écrit.

Il ne pouvait empêcher son imagination de dériver vers Pellestrina. Il trouva le temps de s’entretenir avec Vianello, mais fut déçu du peu d’éléments que le sergent avait à rapporter. Il fut intrigué par une chose, cependant : la très forte impression qu’avait eue son adjoint, en parlant avec les gens de Pellestrina, que tous considéraient Bottin comme n’étant pas des leurs. Cela confirmait un soupçon qu’il avait eu lui-même, sans se souvenir ni quand, ni comment. Et lorsqu’il y resongea, Brunetti trouva la remarque de Vianello encore plus bizarre. Il était inhabituel, avait-il appris par expérience, que les membres d’une communauté aussi étroitement repliée sur elle-même que celle de Pellestrina fissent collectivement état de leur désapprobation vis-à-vis d’un des leurs. Le secret de leur survie avait toujours été le maintien d’un front uni contre les étrangers, et rien ne leur était plus étranger que la police. Il était aussi frappé par la différence entre ce que l’on disait de Giulio et de son fils. Tout le monde déplorait la mort du jeune homme, mais personne, à Pellestrina, ne paraissait verser une larme sur Bottin père. Et le plus bizarre de tout était qu’ils n’avaient rien fait pour cacher ces sentiments.

La marée sans cesse montante des papiers éloigna l’esprit de Brunetti de ces préoccupations pendant les deux jours suivants. Marotta l’appela, le vendredi, pour lui dire qu’il reviendrait lundi de Turin. Brunetti ne lui demanda pas



Télécharger



Déni de responsabilité:
Ce site ne stocke aucun fichier sur son serveur. Nous ne faisons qu'indexer et lier au contenu fourni par d'autres sites. Veuillez contacter les fournisseurs de contenu pour supprimer le contenu des droits d'auteur, le cas échéant, et nous envoyer un courrier électronique. Nous supprimerons immédiatement les liens ou contenus pertinents.