M: L'homme de la providence by Antonio Scurati

M: L'homme de la providence by Antonio Scurati

Auteur:Antonio Scurati [Scurati, Antonio]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Les Arènes
Publié: 2021-08-26T00:00:00+00:00


1928

Rodolfo Graziani

Syrtique orientale, janvier 1928

L’état de guerre est déclaré le premier jour de la nouvelle année. Une fois de plus, les négociations avec le sénoussite Salih al-Atioush, chef évasif, sournois et hyperbolique des Mogarba al-Raidat, n’ont rien donné. Le moment de la suprématie militaire est venu, la parole est aux armes.

L’objectif tactique de ce premier cycle d’opérations est bien défini : jonction côtière des territoires tripolitain et cyrénaïque avec action convergente sur Al-Nofiliyya et El-Merduma de troupes issues des deux colonies. L’horizon stratégique ultime est tout aussi clair : occupation définitive de tous les territoires situés au nord du 29e parallèle, mise en déroute de la tribu des Mogarba, soumission totale des autochtones. La méthode est évidente : violence systématique.

Avant de se diriger vers le sud, il faut assurer ses flancs et ses arrières. Il est impossible de s’aventurer vers les immenses déserts du Fezzan tant que la Ghibla, à l’ouest, et le désert syrtique, à l’est, demeureront armés des deux côtés de la longue ligne des opérations. On ne part pas à la conquête de l’infini avec ses arrières et ses flancs à découvert.

Voilà pourquoi la colonne emmenée par le général Graziani, forte de deux bataillons libyens, de deux bataillons érythréens, d’un peloton de spahis et de deux mille neuf cents chameaux, s’ébranle le 3 janvier 1928 de la base de Tsemed Hassan vers Bir Matrau afin de rejoindre le groupe léger de Sahariens aux ordres d’Amédée de Savoie-Aoste, le groupe irrégulier et une section de cavalerie légère. Au cours des trois jours suivants, ils marchent sans haltes et sans embûches, longeant la ligne méridionale des puits de la Syrtique. Graziani et ses hommes ne sont pas seuls : une armée de fantômes les accompagne. Les sabots des chameaux et des chevaux piétinent, en effet, les os des soldats italiens ensevelis sous le terrain pierreux lors des offensives ratées des décennies précédentes.

Le premier contact avec les indigènes a lieu le 6 janvier à Hraoua, sur le lit sec d’un ancien cours d’eau. De petits groupes de guerriers Orfellini et Hsun, avant-gardes du chef des Mogarba, sont désarmés sans résistance. Ce qui pourrait passer pour un premier succès, quoique très modeste, est en réalité un mal : tout effet de surprise est désormais prescrit. Il ne reste à Graziani qu’un espoir : que le chef des Mogarba, piqué dans son orgueil guerrier, se retourne contre les attaquants. Il serait alors pris en étau entre deux feux, puisque d’autres troupes italiennes marchent dans son dos en direction de la Cyrénaïque. Mais le matin du 8 janvier, les avions de reconnaissance communiquent que les ennemis s’enfuient vers le sud en empruntant les canaux à sec entre Al-Nofiliyya et El-Merduma et vers Djifa.

Ainsi, cinq jours après le début des opérations, l’éternel dilemme se pose déjà : poursuivre l’ennemi en fuite en étirant dangereusement la ligne des opérations, ou le laisser se disperser en petites bandes imprenables, prêtes à se réunir dans de nouvelles et futures embuscades ? Un terrible dilemme car, d’un côté,



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