L'Inde De Demain by Akash Kapur

L'Inde De Demain by Akash Kapur

Auteur:Akash Kapur [Kapur]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Albin Michel
Publié: 2014-09-29T17:00:00+00:00


Selvi pensait elle aussi à l’avenir. Elle rêvait d’avoir un meilleur emploi, un plus gros salaire. Comme Hari, elle voulait faire quelque chose de sa vie. Cependant elle n’était pas aussi ambitieuse. Elle ne prévoyait pas de quitter sa place pour aller frapper à la porte d’une autre compagnie ; elle se déclarait loyale vis-à-vis des gens qui l’avaient embauchée.

Pendant l’entretien, un recruteur lui avait demandé où elle se voyait cinq ans plus tard. Selvi avait répondu qu’elle espérait avoir un poste équivalent au sien. Je trouvais que c’était une bonne réponse sur le plan stratégique. Mais Selvi avait parlé en toute sincérité. Elle avait une vision traditionaliste du monde du travail ; elle voulait grimper les échelons à l’intérieur d’une seule et même entreprise.

Il y avait déjà plus d’un an que nous nous rencontrions de temps en temps. J’avais l’impression que nous nous connaissions plutôt bien. Elle semblait plus à l’aise avec moi qu’au début. Elle soutenait mon regard pendant les conversations. Elle me posait même, à l’occasion, des questions personnelles. Et elle ne faisait plus d’efforts de garde-robe pour me recevoir : le matin, quand elle ouvrait sa porte, il lui arrivait d’être encore en chemise de nuit.

D’un autre côté, elle refusait toujours de me voir en dehors de l’appartement. Et nos rencontres avaient un côté confidentiel, pour ne pas dire clandestin, qui me procurait un léger sentiment de culpabilité – comme si je transgressais quelque règle de bienséance chaque fois que j’arrivais chez elle. Le gardien de la résidence me faisait signer son registre, puis il m’accompagnait à travers la cour jusqu’au bâtiment de Selvi. Là, immobile au pied de l’escalier, il me suivait des yeux comme pour s’assurer que je montais bien à l’appartement annoncé.

À deux reprises, dans cet escalier, j’ai croisé une femme – une voisine sans doute – qui avait un visage sévère et les cheveux attachés en chignon derrière la nuque. Elle m’a dévisagé fixement la première fois qu’elle m’a vu. À notre seconde rencontre, j’ai souri. Elle a aussitôt détourné la tête. Elle avait l’air très mécontente.

Je rendis visite à Selvi le Jour de la République – le 26 janvier, date de l’adoption de la Constitution indienne. D’Auroville jusqu’à Chennai, la route était bordée de drapeaux et de portraits des pères de l’indépendance. Dans toutes les cours d’école, des enfants en uniforme bleu et kaki se tenaient au garde-à-vous pour le salut au drapeau et l’hymne national.

Selvi ne travaillait pas ce jour-là. Elle semblait assez détendue. Elle me raconta qu’elle avait mangé au restaurant, la veille au soir, avec ses amies. Elle insista sur le fait qu’elles n’avaient pas dîné dans un de ces endroits « à la mode où la musique est trop forte ». Mais cette sortie était tout de même un petit luxe, un extra qu’elle se permettait rarement et qu’elle n’aurait jamais envisagé dans son village natal. C’était un des privilèges de la vie à la ville, précisa-t-elle. Et ça comptait beaucoup.

— Une autre fois, peut-être pourrais-je venir avec vous ? demandai-je.



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