Le Decameron by Jean Boccace

Le Decameron by Jean Boccace

Auteur:Jean Boccace [Boccace, Jean]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Nouvelles - Contes
Éditeur: Ebooks libres et gratuits
Publié: 2011-06-05T04:00:00+00:00


NOUVELLE II

L’ESCLAVE INGÉNIEUX

Vous n’ignorez pas qu’au nord, et tout auprès de la Sicile, il y a une île qu’on appelle Lipari. Vous saurez donc qu’il y eut autrefois, dans la capitale de cette petite île, une jeune fille nommée Constance, qui joignait à une naissance honnête une figure très-intéressante. Un jeune homme, à peu près de son âge, nommé Martucio Gomito, qui ne manquait ni d’esprit ni de bonne mine, en devint amoureux. La demoiselle, qui lui trouvait des agréments infinis, se fit un devoir de répondre à son amour, et n’était jamais plus contente que lorsqu’elle le voyait ou qu’elle pouvait s’entretenir avec lui. Martucio, encouragé par ce tendre retour, se hasarda de la faire demander en mariage à son père, qui la lui refusa net, parce qu’il le trouvait trop pauvre.

Le jeune homme, piqué du motif du refus, arma, de moitié avec quelques-uns de ses parents et de ses amis, une petite galère, et jura de ne retourner dans sa patrie qu’après avoir fait une brillante fortune. Quand le vaisseau fut prêt, il s’embarqua, dans l’intention d’exercer le métier de corsaire, et fit voile vers les côtes de Barbarie. Il se tint quelque temps sur cette terre, attaquant et pillant tous les vaisseaux qui n’étaient pas en état de lui résister. La fortune lui fut presque toujours favorable. Il amassa beaucoup de biens dans très-peu de temps, plus même qu’il n’en fallait pour figurer avantageusement dans son pays, s’il eût voulu y retourner. Mais l’ambition d’augmenter ses richesses le retint encore sur mer, et cette ambition démesurée causa son malheur. Il fut attaqué à son tour par des Sarrasins ; il se défendit longtemps, mais enfin il fallut céder à la force. Il fut pris avec tout ce qu’il avait piraté, et conduit à Tunis, où il demeura longtemps prisonnier, dans une extrême misère. La plupart de ses compagnons avaient été tués dans le combat, et son vaisseau coulé à fond, après que les Barbaresques l’eurent pillé.

Bientôt le bruit courut à Lipari que Martucio, et tous ceux qui s’étaient embarqués avec lui, avaient péri sur mer. Constance, que le départ de son amant avait fort affligée, ne pouvait se consoler de sa perte. Après avoir longtemps pleuré sur sa malheureuse destinée, elle résolut de ne plus vivre ; mais ne pouvant gagner sur soi de se détruire elle-même, elle s’avisa d’un moyen assez singulier pour se réduire à la nécessité de mourir. Elle sortit un jour secrètement de la maison de son père, et s’en alla au port, dans l’intention d’entrer dans la première barque de pêcheur qu’elle trouverait vide, pour s’abandonner ensuite à la merci des vents et des flots. Elle en aperçut une, séparée de toutes les autres, qu’elle trouva fournie de mâts, de voiles et de rames, parce que les matelots en étaient sortis depuis peu. Elle y entre, la détache, et prend le large à force de rames et de voiles ; car elle entendait un peu la navigation, comme toutes les femmes de cette île.



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