La Fée Benninkova (LE DILETTANTE) (French Edition) by Franz Bartelt

La Fée Benninkova (LE DILETTANTE) (French Edition) by Franz Bartelt

Auteur:Franz Bartelt [Bartelt, Franz]
La langue: fra
Format: epub
ISBN: 9782842636593
Éditeur: Le Dilettante
Publié: 2012-05-20T23:00:00+00:00


8

L’opération fut rondement menée. Je ne sais pas si on peut parler de chance, mais il se trouvait que mon appartement intéressait le neveu de Me Goguelet, le notaire, un jeune homme sans situation qui, sous les conseils de son oncle, se constituait une rente en louant à bon prix des logements qu’il achetait à bon prix. Il a acheté le mien à bon prix et il me le loue à bon prix.

En moins de quinze jours, j’avais échangé mon statut de propriétaire contre une condition de locataire. Sous l’évier de la cuisine, les liasses de liquidités emplissaient un pot-au-feu. Quand je soulevais le couvercle, il montait du récipient une odeur de lendemains qui chantent. C’était assez enivrant. Il y avait là de quoi vaincre les résistances les plus inébranlables de Marylène, j’en étais persuadé, la conscience morale n’étant qu’une minauderie destinée à augmenter la valeur de ce qu’on a à vendre.

À ce moment-là, j’ignorais encore qu’elle fréquentait le chef du rayon des accessoires automobiles. Et assez gravement pour envisager d’unir sa destinée à la sienne. En fait, grâce à moi, ils se montaient en ménage, ils équipaient leur maison. À croire que j’avais une tête de liste de mariage. Pendant deux ans, j’ai donc contribué sans le savoir à l’aménagement de leur nid d’amour.

Pour une hôtesse de caisse, Marylène avait des goûts de luxe. Elle travaillait au supermarché, mais se fournissait en vaisselle dans les magasins à bourgeois, au centre-ville. Ses choix ne s’arrêtaient que sur de la marque. Elle avait la folie des grandeurs. C’est une propension qui occasionne des dépenses pénibles quand on y va de sa poche. Elle y allait de la mienne et, comme je méconnaissais cet aspect de la chose, tout allait pour le mieux et sans grincement de dents.

Pendant un moment, l’idée m’a effleuré qu’elle voulait peut-être se marier avec moi. Je ne dis pas qu’elle me le laissait entendre, mais elle me répétait souvent qu’elle se sentait bien en ma compagnie, qu’elle avait beaucoup de plaisir de me rendre visite, que personne n’avait jamais été avec elle aussi gentil que moi. Ma nature sentimentale entretenait l’illusion. La solitude est un des hauts lieux du ressassement. À force de spéculer pour bonifier le temps qui passe, mais en l’occurrence pour rien ni personne, on finit par conférer de la réalité aux assemblages de l’imaginaire. Je m’étais imprégné de cette hypothèse qui avait sa logique, ses tenants et ses aboutissants dans mon quotidien, dans nos bavardages affectueux, dans nos manigances spécialisées. Sans poursuivre des objectifs strictement matrimoniaux, une femme qui s’abandonne à certaines caresses se comporte déjà, à mon avis, comme une épouse potentielle. En vérité, à la longue, je percevais nos familiarités comme un acompte sur une vie de couple officialisée. Sans doute n’y voyait-elle, de son point de vue, qu’un témoignage de camaraderie.

Elle avait beau avoir donné un accord de principe, son orgueilleuse coquetterie lui inspirait des modérations qui confinaient, parfois, sinon à la pruderie, du moins à la prudence. Il lui



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