Gabin, Ventura, Delon by Philippe Durant

Auteur:Philippe Durant [Durant, Philippe]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Sonatine
Publié: 2014-10-04T22:00:00+00:00

LES ANGES DANS NOS CAMPAGNES

Le cinéma français reste trop souvent parisien, vice dont il ne parvient pas à se départir. Il lui arrive parfois d’oser sortir des étroites limites de la capitale pour aller voir si ailleurs l’herbe n’est pas plus verte et les crimes plus appétissants. Grandes villes et petits villages ont ainsi droit à la visite de cinéastes exploitant des histoires les mettant rarement en valeur. Le polar n’est pas une annexe des offices de tourisme.

Marseille, par exemple, ne sort pas grandie de l’image que le septième art en donne. Il faut dire que la cité phocéenne se situe à part, si profondément ancrée dans le banditisme qu’à côté Chicago fait figure de camp de vacances. Marseille, c’est la plaque tournante de tous les trafics, l’écrin de toutes les corruptions, le lieu de tous les règlements de comptes, le point de rendez-vous de tous les malfrats. Le folklore à la Pagnol y perd ce que l’ambiance à la Scarface y gagne.

Borsalino se déroule dans et autour de Marseille, avec ses fusillades et ses coups fourrés.

« Le film ne pouvait pas se faire ailleurs, confie Jacques Deray. C’est une ville mystérieuse et attirante qui ne se dévoile pas du premier coup. C’est une jolie femme qu’il faut savoir aborder. Ce qui me plaît, ici, c’est la chaleur, la forme de liberté que l’on ne retrouve pas exactement ailleurs. On aborde les choses avec désinvolture, ce qui est pour moi une grande qualité car cela veut dire que l’on situe les choses à leur juste niveau. Si je m’étais écouté, je tournais un mois de plus à Marseille. J’ai été très sensibilisé par le vieux Marseille et par la lumière qu’il y a dans la ville. »

L’occasion pour le citoyen lambda d’apprendre que la forteresse marseillaise est entre les mains de voyous chevronnés et d’une municipalité pourrie. La loi y est peu respectée et la police réduite à compter les points. Le commissaire Fanti (Daniel Ivernel) est très clair : « Tant que les choses se passent entre vous, nous avons l’habitude d’intervenir le moins possible. Quand les loups se dévorent, ça fait l’affaire du berger. »

Marseille, peuplée de loups et de moutons ou, plus précisément, de chacals et de pigeons. Mais Borsalino, ce sont les années 1930. Depuis, les choses ont-elles changé ? Les lendemains de guerre ont-ils apporté un peu d’ordre dans cette pétaudière ? Pas du tout !

Les Hommes se déroule également dans l’arène du crime. Il n’y est question que de trafics de cigarettes et de personnages louches dessoudés en pleine rue. Massilia, terre de feu.

Pour éclaircir cette noirceur, Marseille offre un climat ensoleillé (il pleut rarement dans les films tournés en son sein), sans mistral (qui y souffle pourtant la moitié de l’année) et avec des rues pittoresques : le quartier du Panier avec ses artères pentues est systématiquement présent avec vue sur d’accortes jeunes femmes dont certaines ont la plastique de Mireille Darc (Borsalino).

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