Champavert, les comtes immoraux by Pétrus Borel

Champavert, les comtes immoraux by Pétrus Borel

Auteur:Pétrus Borel
La langue: fra
Format: epub
Tags: Literature
Éditeur: eBooksLib
Publié: 2001-11-06T00:00:00+00:00


PASSEREAU, L'ECOLIER

1 carabins :

Heureusement, mon cher Passereau, que je ne crois point à la vertu des femmes : -sans cela, d'honneur !

J'aurais eu un nez de carton d'une belle corpulence.

-Que tu es lycéen, mon cher Albert ! -déjà, j'avais eu quelques lointains soupçons : ma vierge ne me paraissait pas très immaculée ; sa respectable mère m'avait tout le faux air d'une appareilleuse ; et puis j'avais remarqué que le frontal ou coronal de son crâne était peu développé ou déprimé, que la distance occipitale de ses oreilles était énorme, et que son cervelet, siège certain de l'amour physique, comme tu sais, formait une protubérance extraordinaire : elle avait en outre les yeux fendus à la manière des vênus antiques, et les narines ouvertes et arquées, infaillible signalement de luxure.

C'était donc ce matin, à sept heures ; après avoir tambouriné fort long-temps sur la porte, on m'ouvre, effarée, et l'on se jette dans mes bras et l'on me couvre la figure de caresses : tout cela m'avait fort l'air d'un bandeau de colin-maillard dont on voulait voiler mes yeux. -en entrant, un fumet de gibier bipède m'avait saisi l'olfactif. -corbleu ! Ma toute belle, quel balai faites-vous donc rissoler ? Il y a ici une odeur masculine ! ...

-Que dis-tu, ami ? Ce n'est rien, l'air renfermé de la nuit peut-être ! Je vais ouvrir les croisées.

-Et ce cigarre entamé ? ... vous fumez le cigarre ?

Depuis quand faites-vous l'espagnole ?

-Mon ami, c'est mon frère, hier soir, qui l'oublia.

-Ah ! Ah ! Ton frère ; il est précoce, fumer au berceau, quel libertin ! Passer tour à tour du cigarre à la mamelle ; bravo !

-Mon frère aîné, te dis-je !

-Ah ! Très bien. Mais, tu portes donc maintenant une canne à pommeau d'or ? La mode est surannée !

-C'est le bâton de mon père qu'hier il oublia.

-À ce qu'il paraîtrait, hier, toute la famille est venue ? -des bottes à la russe ! ... ton pauvre père, sans doute hier aussi les oublia, et s'en est retourné pieds nus ? Le pauvre homme ! ...

À ce dernier coup, cette noble fille se jeta à mes genoux, pleurant, baisant mes mains, et criant : -oh ! Pardonne-moi ! écoute-moi, je t'en prie ! Mon bon, je te dirai tout ; ne t'emporte point !

-Je ne m'emporte point, madame, j'ai tout mon calme et mon sang-froid ; pourquoi pleurez-vous donc ? ...

Votre petit frère fume, votre père oublie sa canne et ses bottes, tout cela n'est que très naturel ; pourquoi voulez-vous que je m'emporte, moi ? Non, croyez-moi, je suis calme, très calme.

-Albert, que vous êtes cruel ! De grâce, ne me repoussez pas sans m'entendre, si vous saviez ? j'étais pure quand j'étais sans besoin. -si vous saviez jusqu'où peut vous pousser la faim et la misère ? ...

-Et la paresse, madame.

-Albert, que vous êtes cruel !

À ce moment, dans un cabinet voisin, partit un éternûment formidable.

-Ma belle louve, est-ce votre père qui oublia hier cet éternûment, dites-moi ?



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