Capitaine Suicide by Brussolo Serge

Capitaine Suicide by Brussolo Serge

Auteur:Brussolo Serge [Brussolo Serge - Capitaine Suicide]
La langue: fra
Format: epub
ISBN: 9782744312083
Éditeur: AlexandriZ
Publié: 2015-05-09T00:00:00+00:00


CHAPITRE VIII

Dans le courant de la matinée David se mit à grelotter et à suer d’abondance. Des bourdonnements lui emplissaient les oreilles sans qu’il puisse déterminer avec certitude s’il s’agissait d’une simple poussée d’hypertension ou de l’approche réelle d’un avion. Il ne cessait de tourner la tête de droite à gauche pour tenter de localiser la position de l’appareil, mais le brouillard était plus dense que jamais et c’est à peine s’il distinguait la vessie ovoïde du ballon au-dessus de son crâne. Le bourdonnement augmentait de minute en minute, menaçant. David titubait sur le pont, s’attendant à voir surgir d’une seconde à l’autre le nez d’aluminium d’un gros charter égaré dans la crasse. Il entendait les hélices, il les voyait presque tournoyer comme des lames. Elles allaient sortir de la brume, fondre sur le dirigeable pour hacher sa fragile enveloppe. Un avion, oui, un gros bombardier recyclé en dortoir-volant…

Comme il s’agitait de plus en plus, menaçant de passer par-dessus les filins, Sigris le prit par le bras et le contraignit à s’allonger sur le sol.

— Il n’y a pas d’avion, dit-elle. Vous avez la fièvre des hauteurs, c’est tout. La fièvre gazeuse. Il faut attendre que ça passe.

Elle le conduisit dans la tente, le coucha, et lui fit boire une tisane douceâtre tirée d’un flacon de terre cuite. Après quoi, elle s’éclipsa pour retourner à sa mystérieuse méditation. David se retrouva seul. Au bout d’un moment il eut l’illusion que l’aérostat faisait un bond dans le ciel, et il crut que son estomac allait se décrocher. Sans doute ne s’agissait-il que d’un brusque tourbillon, mais les cercueils remuèrent sous ses omoplates, s’entrechoquant avec des grincements inquiétants. C’était comme si le ballon était subitement pris de folie. Les écoutes hurlaient, les mailles du filet gémissaient. « C’est la fièvre, pensa David. Je ne dois pas y prêter attention, ça va passer… »

Mais il entendait les corps brinquebaler entre les parois des cercueils, se cognant aux planches. Et c’était comme un concert de protestations. La plainte exaspérée de voyageurs transportés en dépit du bon sens. David se mordit la lèvre. Il avait peur du mécontentement des morts, il craignait leurs reproches, leurs sanctions. Si le ballon continuait à s’agiter, ils allaient être malades, souffrir du mal de l’air comme les passagers d’un avion pris dans une turbulence. Sigris penserait-elle à distribuer des sacs en papier et des bonbons à la menthe ?

« Bon sang, s’étonna-t-il soudain. Je suis en train de perdre les pédales. » Il rassembla ses forces pour s’asseoir. Les caisses grinçaient toujours. Le « pont » bougeait de plus belle, comme si la nef était aspirée par le vent.

— Sigris ! cria-t-il, est-ce que nous bougeons ? Est-ce que nous bougeons réellement ?

Il n’osait plus croire aux informations transmises par ses sens. Mais personne ne lui répondit. Luttant contre le vertige, il sortit de la tente à quatre pattes. La jeune fille se tenait immobile à la proue du vaisseau, assise dans la position du lotus, les yeux levés vers le ciel.



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