Bréviaire méditerranéen by Predrag Matvejevitch

Bréviaire méditerranéen by Predrag Matvejevitch

Auteur:Predrag Matvejevitch
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Fayard/Pluriel
Publié: 2020-08-15T00:00:00+00:00


On ignore dans quelle mesure les Arabes étaient familiers de la mer et de la navigation dans les régions d’où ils étaient issus. De ce côté de la Méditerranée, ils apprirent et maîtrisèrent facilement cet art. Ils vainquirent la flotte byzantine près du cap Phénix, menacèrent Gênes et Venise, dominèrent les côtes espagnoles et catalanes. Ils inventèrent ou améliorèrent eux-mêmes certains des instruments et des accessoires dont ils disposaient, empruntant les autres ou s’en emparant de force. Ils possédaient leur propre astrolabe (qu’ils appelaient dans leur langue kamal ou safinah); ils déterminaient à l’aide de l’alidade, qu’Archimède avait perfectionnée à Syracuse, leur position par rapport aux étoiles et au soleil; Al-Hawkandi confectionna un sextant de grande qualité qu’il nomma surfas-al-fahri. Azimut est un mot arabe, que nous avons tous adopté (il a pour racine, de même que zénith, le mot sumt, qui signifie chemin). Venise emprunta à l’arabe le nom arsenal, qu’elle donna au célèbre bâtiment de la lagune. La darsena, située près du port de Gênes, à côté de l’ancien chantier naval, est de même origine, ainsi que la vieille darse, construite sous Henri IV à Toulon. Il existe dans le port de Barcelone quatre darses : la plus belle m’a paru la Dàrsena de Sant Beltran, entre le môle du même nom et le Moll de Barcelona, près de la capitainerie, non loin du monument à Colomb. Les Arabes, avant bien d’autres, connurent l’usage du goudron (al-gatran) en construction navale. Toutes les marines méditerranéennes, puis celles du monde entier, adoptèrent leur terme d’amiral. Les chiffres arabes (sifr signifie vide ou zéro) remplacèrent leurs homologues romains. On ignore s’ils entrèrent en possession de la boussole avant les autres Méditerranéens (avant même les marins d’Amalfi). Ils l’appelaient dirah ou dayra (rond ou cercle). Lorsque l’illustre navigateur européen atteignit les côtes de l’Est africain, il chercha un pilote qui le mènerait jusqu’aux Indes : c’est l’Arabe Ahmed Ibn Madjid qui prit la barre du navire de Vasco de Gama. Il connaissait l’art de la navigation aussi bien que les marins lusitaniens et espagnols, conquérants du Nouveau Monde. Ibn Khaldun nota que toutes les côtes de la mer de Roumélie étaient inscrites sur les cartes arabes, mais non pas celles de l’Atlantique. Les Arabes donnaient à la carte les noms de as-sahifa (c’est ainsi que la désigne Ibn Khaldun lui-même), as-sura, tarsim, deftar; d’après le grec et le latin, ils l’appelèrent respectivement kharita et tavla (ou tabla). Une telle abondance terminologique est en elle-même significative : cet inventaire illustre l’importance des Arabes en Méditerranée.

Les voyageurs arabes, plus peut-être que d’autres, furent d’une aide précieuse pour les cartographes. Plus favorables à la terre qu’à la mer, ils se déplaçaient plus volontiers à pied que par bateau. Les croyants priaient cinq fois par jour, trois fois en voyage, se tournant vers La Mecque : vers l’est lorsqu’ils se trouvaient à l’ouest, vers l’ouest lorsqu’ils étaient à l’est, se représentant la distance entre eux et la Ka’ba et se situant ainsi par rapport à leur lieu saint.



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