À l'ombre du pouvoir by Neely Tucker

À l'ombre du pouvoir by Neely Tucker

Auteur:Neely Tucker [Tucker, Neely]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Policier
ISBN: 9782072634345
Google: CVYvDwAAQBAJ
Éditeur: Gallimard - Série Noire
Publié: 2017-09-12T22:00:00+00:00


20

Quelque part dans ce grand et merveilleux pays, se dit Sully, des écrivains travaillaient avec amour, trouvant en eux une profonde passion qui les tirait vers des sommets de littérature.

Lui, pour sa part, puisait son inspiration à partir d’un sentiment de fureur. L’exercice lui avait plutôt bien réussi, et ce depuis le tout premier article – un truc en free-lance pour le Times-Picayune à propos de la pollution des puits de pétrole du bassin d’Atchafalaya due aux bateaux, remorqueurs, et pêcheurs de crevettes qui avaient constitué tout l’univers de son père.

Des années plus tard, la moitié des zones de guerre de la planète dans son rétroviseur, il était assis à son bureau dans une salle de rédaction dans une ville violente, le dos violet, la jambe douloureuse, une petite bande de sang séché sur le menton, à extraire ses idées du même puits émotionnel.

Affalé sur son siège, il tapait sur son clavier, le Bend s’esquissant en toile de fond, le décor vu depuis le rivage prêt à se déployer. Lanky Dreads, Short Stuff et des tueurs du même genre entrèrent en scène, rivalisant avec les bars gay de l’animée O Street, de la coke sur les tables de box à peine éclairés et des sachets d’herbe échangés dans la pénombre du Bend.

Billy Ellison, un jeune homme charmant et brillant de la bonne société de Washington, était promis à un avenir radieux – droit à Georgetown, fortuné, des relations personnelles et professionnelles dans toute la capitale de la nation, un fauteuil réservé d’office pour certaines soirées de la Maison-Blanche. Le garçon de vingt et un ans était populaire dans son université, conduisait une élégante Mercedes décapotable, et poursuivait d’excellentes études. Il incarnait le rêve américain, et la dernière génération de l’une des plus illustres familles de Washington.

C’est pourquoi l’annonce de son homicide choqua autant que celle du quartier présumé de son décès. Billy Ellison a été retrouvé flottant sur le Washington Channel la semaine dernière avec une balle dans la tête tirée à bout portant – au Frenchman’s Bend, cette bande de terre boueuse en friche et marché à ciel ouvert de la drogue bien connu qui s’avance dans le canal au niveau du front de mer à Southwest. Les registres de la police attestent que l’ancien parc à esclaves serait l’endroit le plus mortel de la capitale de la nation, un lieu où les drogues et le meurtre sont aussi courants que la pluie.

Les dossiers en papier kraft sur le bureau lui fournirent des noms, des chiffres, et des statistiques. Il avait téléphoné aux proches d’autres jeunes gens également assassinés là-bas sans rien obtenir de la plupart, mais ajouté les noms et leurs courtes vies à son récit, ultime occasion de les voir mentionnés dans un document public. Sa carte des homicides lui donna le contexte, la vision d’ensemble et la géographie. Une relation spatiale des crimes avec la population, à laquelle il jetait des coups d’œil réguliers histoire de confirmer son point de vue.

Jeff Weaver, le flic en charge de l’enquête, ne répondit pas, quand il l’appela.



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