Les Vagabonds du rail by Jack London

Les Vagabonds du rail by Jack London

Auteur:Jack London [London, Jack]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Essai, voyage
ISBN: 9782264009197
Google: hWGiSQAACAAJ
Éditeur: Ebooks libres
Publié: 2013-01-16T22:24:26+00:00


VI

VAGABONDS QUI PASSENT DANS LA NUIT

Au cours de mes vagabondages j’ai rencontré des centaines de trimardeurs en compagnie desquels j’ai fait les cent coups, qui ont passé et que je n’ai plus jamais revus. Certains croisaient et recroisaient ma route avec une périodicité surprenante, tandis que d’autres s’obstinaient à manifester tout près de moi leur présence, tout en restant invisibles comme des ombres.

C’est à la poursuite d’un de ces derniers que je traversai tout le Canada, plus de quatre mille cinq cents kilomètres de voie ferrée, et pas une fois mes yeux n’eurent la chance de s’arrêter sur lui. Il avait pour monica « Jack-le-contre-cacatois ».

Les monicas sont les « noms-de-rail » dont les vagabonds s’affublent entre eux. Joë Larry, par exemple, était timide : on lui donna le sobriquet de Joë-le-froussard. Aucun hobo qui se respecte n’aurait choisi de lui-même le nom de « Derrière-en-compote ». Très peu de vagabonds aimaient à évoquer le temps où ils trimaient ignoblement, aussi les monicas désignant des professions sont-elles très rares ; cependant, je me souviens d’avoir lu les suivantes : Noiraud-le-mouleur, Rouge-le-peintre, Chi-le-plombier, chaudronnier, matelot, le vagabond-imprimeur. « Chi » – prononcez tchaï – est, entre parenthèses, le nom argotique de Chicago.

D’ordinaire, les vagabonds préféraient former leurs monicas d’après la localité d’où ils venaient, tels que : Tommy-de-New-York, le Svelte-du-Pacifique, le Forgeron-de-Buffalo, Tim-de-Canton, Jack-de-Pittsburg, Brillant-de-Syracuse, Mickey-de-Troy, K. L. Bill et Jimmy-du-Connecticut. Puis il y avait encore « Jim-le-mince de la montagne du Vinaigre qui n’a jamais rien fait et n’en fichera jamais un coup ». Un « brillant » est toujours un nègre, ainsi dénommé sans doute à cause des reflets de son teint. Le « Brillant-du-Texas » et le « Brillant-de-Toledo » indiquaient à la fois la race et le lieu de naissance.

Parmi ceux qui faisaient connaître leur extraction, je me rappelle les suivants : « Le Brillant-de-Frisco », « l’Irlandais-de-New-York », le « Français-du-Michigan », « Jack-l’Anglais », le « Gosse Cockney », le « Hollandais-de-Milwaukee », « Ventre-jaune », « Créole-du-Mississipi », à qui, je crois, cette monica avait été imposée.

D’autres portaient le nom de leurs particularités physiques, comme le « Svelte-de-Vancouver », le « Courtaud-de-Détroit », le « Plein-de-Soupe-de-l’Ohio », « Jack-le-long », le « Grand-Jim », le « Petit-Joë », « Le Clin-d’œil-de-New-York », le « Pif-de-Chicago », et « Ben-le-Tortu ».

Sur le château d’eau de la gare de San-Marcial, dans le Nouveau-Mexique, l’avis suivant était inscrit voilà douze ans :

1. – Grand-rue, assez bonne.

2. – Taureaux, pas hostiles.

3. – Dépôt de locomotives, bon pour roupiller.

4. – Trains allant vers le Nord, pas bons.

5. – Habitants, pas bons.

6. – Restaurants bons seulement pour cuisiniers.

7. – Buffet, bon seulement pour travail de nuit.

Le numéro un signifie qu’on pouvait tendre la main dans la rue principale et récolter quelque argent ; le numéro deux, que la police ne tracassait pas les vagabonds ; le numéro trois, que l’on dormait dans le bâtiment servant de dépôt aux locomotives. Cependant, le numéro quatre me paraît ambigu. Les trains allant vers le Nord peuvent être difficiles à attraper ou ne rien valoir pour mendier.



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