Comment Lire Lacan by Slavoj Zizek

Comment Lire Lacan by Slavoj Zizek

Auteur:Slavoj Zizek [Zizek, Slavoj]
La langue: fra
Format: epub
Publié: 2013-04-05T12:35:08+00:00


5. Moi idéal et surmoi : Lacan

spectateur de Casablanca

Rien ne force personne à jouir sauf le surmoi. Le surmoi, c’est l’impératif de la jouissance – Jouis (36) !

Bien que « jouissance » puisse être traduit en anglais par « enjoyment », les traducteurs de Lacan laissent souvent le mot en français afin de rendre sensible son caractère excessif, proprement traumatique : nous ne traitons pas de plaisirs simples, nous traitons d’une intrusion violente, qui apporte plus de douleur que de plaisir. C’est ainsi que nous percevons généralement le surmoi freudien, cet agent moral cruel et sadique qui nous bombarde d’exigences impossibles et qui ensuite observe avec jubilation notre incapacité à y répondre. Rien d’étonnant dans ces conditions à ce que Lacan ait posé en équation jouissance et surmoi : jouir ce n’est pas suivre ses propres tendances spontanées, c’est bien plutôt quelque chose que nous faisons comme un devoir éthique bizarre, voire un peu tordu.

Cette thèse simple, bien qu’inattendue, résume bien la manière dont Lacan lit Freud. Freud a recours à trois termes distincts pour l’agent qui pousse le sujet à agir éthiquement : il parle du moi idéal (Idealich), d’idéal du moi (Ichideal) et de surmoi (Überich). Il a tendance à identifier ces trois termes et use fréquemment de l’expression « Ichideal oder Idealich » (idéal du moi ou moi idéal), et le titre très bref du chapitre III de son petit essai, Le Moi et le Ça est « Moi et surmoi (idéal du moi) ». Lacan introduit une distinction précise entre ces trois termes : le moi idéal désigne l’image idéalisée que le sujet a de lui-même (la manière dont je voudrais être, la manière dont je voudrais que les autres me voient) ; l’idéal du moi est l’agent dont je cherche à impressionner le regard avec mon image du moi, le grand Autre qui me surveille et me contraint à faire de mon mieux, l’idéal que j’essaie de suivre et d’actualiser ; et le surmoi est ce même agent sous sa forme vengeresse, sadique, punitive. Le principe de structuration à la base de ces trois termes est clairement la triade lacanienne « Imaginaire-Symbolique-Réel » : le moi idéal est imaginaire, Lacan l’appelle le « petit autre », l’image idéalisée de mon moi dans le miroir ; l’idéal du moi est symbolique, c’est le point de mon identification symbolique, le point dans le grand Autre à partir duquel je m’observe (et me juge) moi-même ; le surmoi est réel, il est cet agent cruel et insatiable qui me bombarde d’impossibles exigences pour railler ensuite mes essais maladroits pour les remplir, l’agent aux yeux duquel je suis d’autant plus coupable que je m’efforce de lutter contre mes tendances « pécheresses » et de répondre à ses exigences. La maxime cynique du vieux stalinisme à propos des accusés des procès spectaculaires, lesquels protestaient de leur innocence (« Plus ils sont innocents, plus ils méritent d’être fusillés »), est du surmoi de la meilleure eau.

La conséquence de cette distinction précise



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