Boulots de merde ! by Brygo Julien & Cyran Olivier

Boulots de merde ! by Brygo Julien & Cyran Olivier

Auteur:Brygo, Julien & Cyran, Olivier [Brygo, Julien & Cyran, Olivier]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Sociologie
Éditeur: La découverte
Publié: 2016-08-31T22:00:00+00:00


Alain, 54 ans, ouvrier sous-traitant dans une usine de farine

« Aujourd’hui il y a plus de gratte-papier et de chefs que de travailleurs »

« J’ai été recruté en 2008 par une entreprise de maintenance mécanique qui travaillait exclusivement comme prestataire des Grands Moulins de Paris (GMP). On n’était que deux dans l’entreprise : mon patron et moi-même. J’ai bossé quatre ans là-dedans. On faisait la maintenance des moulins. Ça comprend les ateliers d’ensachage pour des sacs qui vont de un à cinquante kilos, les tapis, les élévateurs, les transporteurs… C’est une grosse usine. La maintenir en bon état demande des compétences particulières, parce que c’est de la machinerie de meunerie, c’est très spécial. Quand je suis entré là-dedans, j’avais quarante-huit ans, avec déjà trente ans de mécanique dans les pattes, donc pour moi ça a été rapide.

« Pour les astreintes, on était trois mécanos à tourner vingt-quatre heures sur vingt-quatre : mon patron, moi et un autre prestataire privé. On faisait une rotation sur trois semaines, une semaine pour chacun, et comme ça toute l’année. Ça veut dire que pendant un tiers de l’année, tu peux être appelé à n’importe quel moment pour venir faire une réparation en urgence. L’usine tourne jour et nuit sans interruption, donc quand elle s’arrête, c’est la catastrophe, il faut la faire redémarrer le plus vite possible. Il y a souvent un truc qui casse, un roulement de moteur, une chaîne d’élévateur, une chaîne de transporteur, un surpresseur… Quand tu es sous astreinte, tu fais tes horaires normaux, 7 heures-16 heures, et le reste du temps, y compris le week-end et les jours fériés, tu dois rester joignable à tout moment sur un téléphone portable mis à ta disposition par les GMP. S’il y a une panne, on t’appelle et, hop, tu rappliques aussi sec.

« La rémunération était correcte, mais pas non plus énorme. Autour de 2 300 euros bruts par mois, soit 1 700 en net, plus une prime d’assiduité de 200 euros et une prime d’astreinte de 240 euros. Aujourd’hui, un mécano confirmé qui a quinze ou vingt ans de métier, ça ne dérange pas les employeurs de lui refiler 1 500 euros net. C’est l’équivalent de 10 000 francs, soit le salaire que je touchais il y a trente ans dans la télémécanique, au centime près. Sauf qu’entre-temps la même somme n’a plus la même valeur. En 1985, tu t’en sortais correctement avec 10 000 balles. Aujourd’hui, t’es dans la dèche dès le 2 du mois. Quand on a de la maturité comme moi, c’est vrai qu’on ne se laisse pas faire. À ce prix-là…

« Un matin, mon patron me dit qu’il a décidé d’arrêter. Aux GMP, ça n’a pas traîné, ils m’ont aussitôt prévenu qu’ils ne pouvaient pas me garder. C’est pour ça que je me suis retrouvé en conflit avec eux. J’ai eu aussi quelques bisbilles avec mon patron. Depuis quatre ans, par exemple, je bossais avec mes outils personnels : tout le matos que j’utilisais à l’usine, c’est moi qui le fournissais.



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