King Cole by William R. Burnett

Auteur:William R. Burnett [Burnett, William R.]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Policier, Littérature américaine, Politique, Roman noir, Fascisme
ISBN: 2869301898
Éditeur: Rivages/Noir
Publié: 1936-01-29T23:00:00+00:00

2.

Read assis dans le bureau du directeur, regardait le paysage d’automne gris et brun qui s’étendait sous la fenêtre. L’Académie était édifiée sur une colline et dominait la petite cité de Benton en contrebas à demi masquée par la brume de l’arrière-saison. Le paysage, la petite cité assoupie paraissaient mélancoliques dans la lumière grise. Read pianotait sur le bras de son fauteuil en prêtant l’oreille au Colonel Brower, un homme gros et suffisant, d’un ennui mortel, d’une soixantaine d’années.

— … dire que nous avons été scandalisés serait peu dire. Votre fils en particulier… Je peux difficilement y faire allusion. Buvant du whisky, se mêlant à ces affreuses filles de rien. Stupéfiant ! Nous avons toujours été fiers de John Cole. Un jeune homme très doué, un peu renfermé, un peu bourru, difficile parfois, mais en dernière analyse un bel exemple du jeune américain viril…

Le Colonel se mettait à ressembler au Sénateur Greeley. La même onction, les mêmes mots creux. Pourquoi n’en venait-il pas aux faits ? Read imaginait l’expression ironique, d’intelligence précoce qui avait dû éclairer le visage de Johnny. Le Colonel n’était certainement pas un homme à même de conseiller, de guider Johnny. Son fils avait déjà en horreur le simulacre.

Le Colonel jeta un coup d’œil sur Read, sentant qu’il ne retenait pas toute son attention, il s’éclaircit la voix avec force afin de poursuivre :

— Je n’entrerai pas dans le détail. La lettre du Capitaine Davis relate l’essentiel. Je sais que vous devez être épuisé et tendu, Gouverneur, à la suite des déplorables événements de la nuit passée. Votre présence ici en dit long sur l’amour que vous portez à votre fils. À vrai dire je ne vous attendais pas. Le Capitaine Davis, et moi-même, pensions…

L’on frappa à la porte.

— Oui. Entrez.

Un grand type maigre, au long visage décharné ouvrit la porte, entra. En uniforme. Il s’inclina légèrement, se défit de sa casquette.

— Capitaine Davis. Notre Commandant Gouverneur Cole. Le Capitaine Davis sort de West Point.

— Mes respects, Gouverneur. C’est un grand honneur.

— Quelque chose à signaler, Capitaine ?

— Eh bien, le cadet Simpson semble faiblir. Vous savez, Colonel, sa mère est venue. Elle n’a pas beaucoup d’argent. Elle se sacrifie pour envoyer son fils ici. Je joue là-dessus. Je crois qu’il pourrait avouer.

Read baissa les yeux, dissimulant son mépris.

— Capitaine, je veux voir le cadet Cole immédiatement.

— Oui, Colonel. Tout de suite. Il est sur le palier.

Le Capitaine sortit.

— Voilà notre plan, Gouverneur, reprit le Colonel. Nous promettons une totale impunité à celui qui nous révélera la provenance de l’alcool. Les autres seront punis. Je vais être franc, et vous avouer que si votre fils n’y était pas mêlé, tous seraient renvoyés. Évidemment, c’est hors de question. Gouverneur, je vous en prie, faites que votre fils nous dise où l’alcool a été acheté. Je préférerais que ce fût lui qui parle. Je déteste l’idée d’avoir à le punir. Le cadet Simpson ne compte pas. C’est un fauteur de troubles. Il vient d’un milieu très ordinaire.

— Dites au Capitaine de faire entrer Johnny.

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