L'Empereur de l'espace by Edmond Hamilton

Auteur:Edmond Hamilton [Gregory, Daryl]
La langue: fra
Format: epub
ISBN: 978-2-84344-784-6
Éditeur: Le Bélial'
Publié: 2017-03-02T16:00:00+00:00

Curt aborda la rue principale de Jungleville, un ruban de terre battue bordé de bâtiments de fortune en métal liage. Les pensions, les tripots et les bars malfamés s’alignaient dans l’éclat aveuglant des ampoules à l’uranite. Une cacophonie musicale régnait, ainsi qu’un brouhaha multilingue.

Il se fraya un chemin au travers de la foule bigarrée qui encombrait la rue : des prospecteurs costauds en combinaison à glissière tachée, des vagabonds de l’espace mal rasés qui tendaient la main, des parieurs interplanétaires au regard froid, des ingénieurs émaciés portant de hautes bottes et exhibant un foudroyant à la ceinture, des spatiaux bronzés venus de Jovopolis pour faire la bringue dans la ville champignon la plus effrénée du Système…

Les Joviens, leur peau verte et leurs pseudo-nageoires se faisaient rares dans les rues. Quand des Terriens ivres les bousculaient par mégarde, ils observaient un silence de mauvais augure.

« Quelqu’un veut acheter un péroreur saturnien ? cria un spatial robuste, un oiseau aux allures de chouette perché sur l’épaule.

– Quelqu’un veut acheter un péroreur saturnien ? répéta l’oiseau en imitant la voix de son maître à la perfection.

– Le plus grand bar de Jupiter ! annonça le haut-parleur d’un débit de boissons bondé. Du vin d’or martien, de l’eau-des-rêves mercurienne… tous les alcools du Système ! »

Curt passait devant un casino où résonnaient les cliquetis des roulettes quantiques quand on l’empoigna par le bras. Un indigène martien, corps mince et peau rouge, le souffle empestant le cognac jovien, se mit à l’apostropher d’une voix aiguë.

« Aide-moi, Terrien ! Je suis en carafe ici depuis un an et je dois regagner Mars pour retrouver ma famille. »

Le capitaine Futur lui rit au nez.

« Tu te trouves sur Jupiter depuis un mois tout au plus, sans quoi ton épiderme se serait dépigmenté. Tu n’as pas de famille, car tu appartiens au peuple de Syrtis, qui élève sa progéniture en communauté. Mais voilà de quoi te payer un verre. »

Stupéfait, le Martien prit la pièce que le colosse roux lui tendait et s’éloigna en toute hâte.

Alors que Curt passait devant une taverne d’où sortait un air effréné qui pulsait du double rythme vénusien, il entendit un chahut démarrer.

« Marshal ou pas, tu n’as aucun ordre à me donner, foi de John Daumer ! rugit un Terrien.

– Je te le donne, et je ne me répèterai pas, répondit une voix d’airain. Quittez la ville sans délai, tes amis et toi. »

Cette voix dure, Curt la connaissait. Jouant des épaules pour fendre la presse, il pénétra sans tarder dans la taverne.

La fumée âcre du tabac des marais vénusien envahissait la vaste salle aux parois de métal où grouillait une foule bigarrée : des prospecteurs, des parieurs, des ingénieurs. Les uns buvaient au long comptoir en verrite, tandis que les autres dansaient avec des filles au visage dur maquillées à outrance.

Tous suivaient le drame qui se jouait. Un grand Terrien à la forte carrure, aux traits accusés, en combinaison blanche à glissière, flanqué de trois sbires au regard mauvais, faisait face

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